Ambidextrie
❰ Livre I – épisode 35 ❱
Camp militaire, jour. Arthur et Lancelot sont dans la forêt en campagne et étudient une carte. | |
Lancelot | Moi, j'essaie de trouver une solution ! |
Arthur | Parce que vous appelez ça une solution, vous ? |
Lancelot | Je suis désolé, je peux pas en même temps commander à droite et à gauche ! Il faut que je délègue les lanciers à Perceval. |
Arthur | Oh non mais allez c'est bon, je vais le faire, laissez tomber. |
Lancelot | Mais enfin, vous allez pas tout faire ! C'est un de vos hommes, quand même ! (Criant.) Seigneur Perceval ! Venez, on a besoin de vous ! |
Perceval | (Au loin.) Je peux pas, je surveille le stock de pain ! |
(Ouverture.) |
Camp militaire, jour. Arthur, Lancelot et Perceval sont dans la forêt en campagne et établissent une stratégie. | |
Lancelot | Le seigneur Calogrenant est parti il y a deux jours pour placer son armée en amont de la rivière. |
Perceval | Ah, c'est pour ça qu'il est plus là... |
Lancelot | Ben oui, on l'a envoyé se positionner en avance ! |
Perceval | Ah bon. Moi, je croyais qu'il était rentré chez lui, alors je me disais « il se fait pas chier, quand même... » |
(Arthur et Lancelot se regardent, circonspects.) | |
Arthur | Bref. Alors nous, quand on va arriver dans la plaine, le seigneur Calogrenant pourra lancer une attaque surprise par la droite. |
Perceval | Plutôt dans le sens du courant de la rivière, alors ? |
Arthur | Plutôt... non, ça je saurais pas vous dire, ça... |
Lancelot | Bon, et en dernier recours, Léodagan se tient prêt avec cent cinquante cavaliers qui arriveraient par la gauche. |
Perceval | Par la gauche... |
Lancelot | Par... la gauche, oui ? |
Perceval | Non mais par rapport au courant de la rivière ? |
Lancelot | Ben... ben j'en sais rien, moi... |
Arthur | Mais qu'est-ce que vous venez emmerder le monde, avec votre rivière, vous ? |
Perceval | Non mais bon, la gauche, la droite, c'est bien gentil ça, mais moi il me faut du concret ! |
Camp militaire, jour. Arthur, Lancelot et Perceval sont dans la forêt en campagne et établissent une stratégie. | |
Arthur | Mais c'est pas compliqué, bon Dieu ! Y a Calogrenant à droite, Léodagan à gauche et nous, on arrive par le milieu ! |
Lancelot | C'est bon, jusque-là ? |
Perceval | Attendez. Moi, si je me souviens bien du coin, y a la rivière qui passe en travers... |
Arthur | Ah mais merde avec votre rivière ! |
Perceval | C'est un point de repère comme un autre ! |
Lancelot | Mais bon Dieu, y a pas besoin de point de repère puisque les envahisseurs vont nous attaquer de face ! |
Perceval | Mais « de face » ça va, c'est le reste qui va pas... |
Arthur | Mais quoi, nom d'un chien ? |
Perceval | Ben la gauche, la droite, là... moi j'aime pas ces trucs... |
Lancelot | (Exaspéré.) Mais qu'est-ce que vous aimez pas ? |
Perceval | Ces conneries de gauche et droite ! Ça veut rien dire, ces machins. Selon comme on est tourné, ça change tout. |
Arthur | Mais qu'est-ce que vous nous chantez ? |
Perceval | Moi, j'estime que quand on parle tactique militaire, il faut employer des termes précis ! |
(Arthur et Lancelot sont décontenancés par la pertinence de cette remarque.) | |
Lancelot | Bah... oui, effectivement, ça peut prêter à confusion... |
Arthur | Non mais attendez, c'est pour vous qu'on dit « gauche » et « droite » nous, c'est pour pas vous embrouiller. |
Perceval | Si, ça m'embrouille ! |
Lancelot | Ah bon ? On peut parler normalement, alors ? |
Perceval | Professionnel ! |
Arthur | Bon, bah alors OK, on reprend depuis le début. Donc, Calogrenant est posté depuis hier soir au nord-ouest de la zone d'attaque... |
Lancelot | Léodagan, sud-sud-est, un peu plus en retrait avec ses cavaliers... |
Perceval | Moi j'aime pas ces histoires de sud-est, nord-ouest et tous ces machins, là... |
Arthur | (Impatient.) Mais quoi, qu'est-ce qu'il y a qui va pas encore ? |
Perceval | Mais c'est un coup à se planterse planter (v.) Se tromper, échouer dans l’accomplissement d'une tâche En savoir plus, ça ! De toute façon, on dit « le nord », selon comme on est tourné, ça change tout ! |
Lancelot | (Tourne les talons et s'en va précipitamment.) |
Camp militaire, jour. Arthur, Lancelot et Perceval sont dans la forêt en campagne et établissent une stratégie. | |
Perceval | Calogrenant, ça va. Maintenant Léodagan, il est où ? |
Lancelot | (Blasé.) Du côté de la forêt, un peu après la clairière où y a une grosse pierre qui ressemble à une michemiche (n.f.) Fesse En savoir plus de pain... |
Perceval | Voilà ! Là, c'est pro ! Là, je comprends ! Et quand Calogrenant va arriver, il va couper par où ? |
Arthur | Il va couper du côté de la rivière, à gauche... |
Perceval | Ah ah ah ! Attention... |
Arthur | Pardon. Du côté de la rivière où y a les brebis qui passent. |
Perceval | D'accord ! Allez, c'est bon ! Je les attends, les envahisseurs ! Ils vont se prendre mon épée dans les côtelettescôtelettes (n.f.) Os de la cage thoracique ; côtes En savoir plus, ça va les calmercalmer (v.) Neutraliser, mettre hors d'état de nuire En savoir plus pour un moment ! Ah, j'ai hâte d'y être ! Ils vont se frotter à la fausse patte du pays de Galles ! |
Lancelot | Les fausses pattes, c'est des gauchers. |
Perceval | Bah oui ! |
Arthur | Vous êtes pas gaucher, vous. |
Perceval | Ah bah si. |
Lancelot | Vous dégainez de la main droite. |
Perceval | Merde... comment on dit l'inverse d'une fausse patte ? |
Arthur | Je sais pas. On dit rien. |
Lancelot | (Moqueur.) La vraie patte ? |
Perceval | Attendez, la vraie patte du pays de Galles, ça veut rien dire... vous voulez que je passe pour un con ? |
(Fermeture.) |
Camp militaire, jour. Perceval est dans la forêt en campagne et discute avec un écuyer. | |
Hervé de Rinel | (Arrive.) Seigneur Perceval ! C'est le Chef de rang qui m'envoie. Ils ont discuté de la signalétique. |
Perceval | Et alors ? |
Hervé de Rinel | Donc ce sera « bras gauche en l'air » pour une salve de flèches et « bras droit en l'air » pour envoyer les lanciers. |
Perceval | (Soupire profondément.) |
(Noir.) | |
Perceval | Toi, un jour, je te cramecramer (v.) Brûler En savoir plus ta famille, toi. |
(Stab final.) |