Arturi Inquisitio

Livre VI – épisode 4

Bureau de Sallustius, jour. Sallustius est à son bureau, Servius est debout à côté de lui. Devant eux se tiennent Pisentius, Desticius, Lurco et Flaccus.
Desticius Nous ne te suivrons pas, Sallustius ! C'est définitif !
Lurco Ce gamin est centurion, déjà ! Si on nous demande de justifier son grade, on est bien dans le pétrin !
Servius Mais qui va venir vous demander de justifier son grade ? C'est déjà arrivé, ça ? Non !
Pisentius Et si ça arrive quand même, qu'est-ce qu'on répond ? Un morveux de la milice urbaine qui passe centurion en une demi-heure...
Desticius Non mais c'est du foutage de gueule !
Flaccus Moi je vais même vous dire : non seulement on n'ira pas plus loin, mais votre gamin, là... en plus... faudrait le rétrograder. Voilà.
Sallustius (Tape sur son bureau et crie.) Bon, ça suffit ! Combien de chefs barbares vous avez bombardés généraux ? Quand y avait pas moyen de les faire plier par la force ?
Flaccus Mais ça n'a rien à voir ! Celui-là il est de chez nous ! Hein ? Y a rien à faire plier !
Servius Y a rien à faire plier ? Et la Bretagne ?
Sallustius Ça fait des semaines que vous nous râpez les raisinsrâper les raisins (loc.) Importuner, agacer, exaspérer quelqu’un
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, avec... avec votre Bretagne !
Desticius Les chefs barbares, quand on en fait des généraux, ils sont déjà considérés comme chefs, par leur peuple !
Pisentius Il est pas chef des Bretons, votre merdeux, que je sache...
Sallustius Mais il est déjà considéré comme un roi ! Bande de péteux ! Qu'est-ce qu'il vous faut de plus, bon Dieu ?
Lurco Mais il a pas l'épée ! T'arrêtes de nous prendre pour des manches, Sallustius ? Il a pas l'épée !
Sallustius (Tape sur son bureau et hurle.) Mais il l'aura, l'épée ! Si y a que ça, il l'aura.
Flaccus (Moqueur et théâtral.) Ha ha ! « Il l'aura », « il l'aura » ! Et il va la trouver où ?
Servius Dans ton cul.
(Flaccus se jette sur Servius, une rixe débute sur le bureau de Sallustius.)
(Ouverture.)
Quartiers riches, jour. Sallustius et Servius sortent du palais, encore ébouriffés par la bagarre.
Sallustius C'est, c'est... c'est leur dernière saison, aux débiles, hein ! Tu peux préparer les outils, on passe directement de la discussion à la... à la désintégration.
Servius Quoi, tous les quatre d'un coup ?
Sallustius Affirmatif ! Tous les quatre ! Dérouillage collectif.
Servius Les quatre en une seule fois, vous avez pas peur que ce soit un peu voyant, non ?
Sallustius Rien à foutre. Tu peux même les crucifier sur une estrade au milieu du forum, si ça te chante. C'est moi qui paie l'orchestre.
Servius Dites, euh... en parlant de buter du monde... si le petit Breton, il rendait un grand service à Rome ? S'il nous débarrassait d'un personnage encombrant, par exemple ? Ce serait bien justifié de le monter en grade, non ?
Sallustius Faut voir. Pourquoi, t'en... t'en as un sous le coude, de... de personnage encombrant ?
Servius Des personnages encombrants, c'est pas ça qui manque, hein... ouais faut que je réfléchisse... mais honnêtement, je préférerais que ce soit lui qui butebuter (v.) Tuer
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un ennemi de la nation, plutôt que moi qui butebuter (v.) Tuer
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quatre sénateurs !
Sallustius (Acquiesce mollement.)
Servius (Hausse les épaules.)
Sallustius Oui...
Bureau de Glaucia, jour. Glaucia est assis à son bureau, Desticius se tient debout à côté de lui.
Desticius Moi, d'accord, je fournis le pognon. Et toi tu fournis quoi, déjà ?
Glaucia La logistique.
Desticius Ah, voilà.
Glaucia Oui, voilà. Et c'est pas le moment de faire le rapiat ! Faut que ça impressionne !
Desticius Ouais mais il faut combien, pour que ça impressionne ? Parce que je te signale que premièrement, le pognon, je le trouve pas dans le cul des vaches. Et deuxièmement... Rome lui a déjà fait des propositions de fric, à ton chef breton. Hein, et... ça l'a pas impressionné... du tout !
Glaucia Oui mais moi je l'invite à Rome ! Il va visiter la ville ! Il va considérer la grandeur de notre civilisation, et boum ! Par-dessus ça, on lui fait tomber un gros paquet de blé.
Desticius Ouais mais c'est combien, « un gros paquet de blé » ? Hein, combien il faut que je mette ?
Glaucia Beaucoup.
Desticius Non mais « beaucoup » combien ?
Glaucia Beaucoup... beaucoup.
Desticius Non non, mais... « beaucoup beaucoup »... c'est trop !
Glaucia Le palais nous donnera combien, quand on aura rétabli la paix en Bretagne, andouille ?
Desticius (Pensif.) Ouais...
Glaucia Allez... fais-moi confiance... on va devenir des... des bienfaiteurs !
Desticius (Dubitatif.) Euh...
Prison, jour. Manilius est d'un côté de la grille, Licinia de l'autre.
Manilius Arturus il est pas venu ? Il a des trucs à faire, c'est ça ?
Licinia Il pense que tu vas pouvoir échapper aux lions.
Manilius Là, maintenant, y a peu de chance.
Licinia Mais qu'est-ce que t'en sais ?
Manilius J'en sais qu'on est venu me l'annoncer ce matin ! La semaine prochaine : les lions.
Licinia Quoi ?
Manilius Ouais ! Je te l'ai pas dit ? Excuse-moi, ça m'est sorti de la tête.
Licinia Mais... c'est vrai... enfin, je veux dire... on peut rien faire ?
Manilius Y a un mec ici qui dit que... quand tu manges que du basilic pendant trois jours, les lions ils refusent de te bouffer. À cause du goût.
Licinia Hé ben... tu veux que je te trouve du basilic ?
Manilius Non merci !
Licinia Bah pourquoi ?
Manilius Parce que je pense que c'est des grosses conneries !
Quartiers riches, jour. Léodagan et Séli sont sur les marches d'un palais.
Séli Vous êtes trop près.
Léodagan Trop près de quoi ?
Séli Bah du bâtiment ! Vous êtes trop près !
Léodagan Bah y a une distance réglementaire ?
Séli Mais si vous vous tenez trop près, vous pouvez pas comprendre ce que vous regardez, non ?
Léodagan Hé bah c'est pareil pour vous, alors... à force d'être trop près, je pige plus rien !
Séli En tout cas, leurs pierrailles, ça me colle des torticolis... j'ai hâte d'être à notre rendez-vous, hein, qu'on passe aux choses sérieuses...
Léodagan Non mais moi je dis chapeau, quoi. Ouais ouais. Chapeau. Parce que quand on pense que c'est les mêmes qui ont construit le Colisée, et puis qui se prennent peignée sur peignée en Bretagne... hé bah je dis chapeau !
Séli Bon, c'est peut-être pas tout à fait les mêmes non plus...
Léodagan Ouais, mais enfin c'est du Romain, quoi ! Hein... d'ailleurs c'est marrant, parce que chez nous, si on tombe sur un Romain, je le découpe en tranches aussi sec, alors qu'ici, euh... des Romains, y en a tout le tour du ventre, euh... bon, alors non plus, j'irais pas, euh... bon... hein ? Mais euh... mais... ils me dérangent moins... j'ai des souplesses. Ouais.
Séli Oui enfin, ici ils sont chez eux ! Ce qui vous agace en Bretagne, c'est peut-être qu'ils ont rien à y foutre !
Léodagan Ouais... c'est contextuel, vous voulez dire ?
Séli (Ne répond rien.)
Villa Aconia, jour. Arthur s'avance lentement dans l'atrium.
Arthur (Patiente quelques instants, puis emprunte un petit couloir et pénètre dans la chambre d'Aconia.)
Chambre d'Aconia, jour. Arthur regarde Aconia dormir.
Aconia (Se réveille en sursaut.)
Arthur Pardon. Parce que je... on... on devait se voir maintenant, mais comme y avait personne dans la maison, j'ai...
Aconia C'est pas grave. Excuse-moi... j'ai pas dormi de la nuit.
Arthur Mais... ça fait rien, je reviens demain !
Aconia Non... t'as pas sommeil, toi ?
Arthur Bah... sommeil, euh... c'est-à-dire, j'ai toujours plus ou moins sommeil...Fait suite à cette autre réplique d'Arthur à Aconia.
Aconia (Tapote la place à côté d'elle, dans le lit.) Alors dors...
Arthur (S'assoit sur le lit, hésitant, puis s'allonge. Il sent quelque chose sous son oreiller, et y découvre une dague au fourreau richement décoré, qu'il remet en place.)
Ferme de Pellinor, jour. Pellinor est assis à une petite table dans la cour de la ferme. Perceval se tient plus loin, prêt au départ.
Perceval Allez, mais Père, euh... pourquoi je pourrais pas partir à l'aventure ?
Pellinor Parce que vous n'avez pas de coéquipier !
Perceval Mais qu'est-ce qu'on s'en fout, au bout d'un moment ?
Pellinor Ah, on s'en fout, on s'en fout... non, moi j'ai trouvé cette idée de coéquipier ce matin, et je... euh... je la trouve satisfaisante.
Nonna (Sort de la ferme.) Mais laissez-le partir, ce gamin, nom d'un chien ! Qu'on change un peu de sujet de conversation ! (Retourne dans la ferme.)
Acheflour (À Pellinor.) Un coéquipier ? Il pourrait peut-être en trouver un en route ?
Pellinor Non bah oui, mais alors quel intérêt ? Non, moi je veux qu'il trouve un coéquipier... sans sortir de l'enclos à chèvres !
Perceval Parce que j'ai plus le droit de sortir de l'enclos à chèvres, maintenant ?
Acheflour Votre père vous propose un petit défi. (À Pellinor.) Je pense qu'en fait, ce que vous cherchez avant tout, c'est... à le stimuler !
Nonna (Sort de la ferme.) Ce qui me stimulerait, moi... ce serait qu'on prenne son père, et qu'on le boucle une fois pour toutes dans l'enclos... à la place des chèvres ! (Retourne dans la ferme.)
Perceval Père, allez ! J'ai fait mon baluchon, et tout ! Mamie m'a préparé des petits poissons panés pour le voyage ! Vous êtes en train de tout foutre en l'air, là ! Mamie !
Nonna (Sort de la ferme.) « Mamie », « mamie »... elle en a ras le couvre-chef, mamie ! C'est elle qui va partir à l'aventure, rien que pour plus vous entendre ! (Retourne dans la ferme.)
Pellinor Non ou alors, ou attendez, j'ai une autre idée !
Acheflour Ah ! Ah... écoutez attentivement votre père.
Nonna (Hors-champ, de la ferme.) C'est ça, soyez bien attentif, ce serait dommage d'en louper un bout...
Pellinor Je vous autorise à partir à l'aventure sans coéquipier... mais toutes les aventures doivent se dérouler à l'intérieur de l'enclos à chèvres.
Perceval Non mais c'est n'importe quoi, là...
Nonna (Sort de la ferme.) Tenez ! Vous savez quoi ? Il vient de s'en trouver un, de coéquipier ! C'est moi, qui partirai avec lui !
Perceval De quoi ?
Pellinor Ah... oui, d'une certaine façon, j'y avais pas pensé, mais... oui, vous pouvez partir à l'aventure avec votre mamie.
Nonna Allez ! En route ! (Frappe Pellinor.) Petit con !
Perceval (Soupire, ennuyé.)
Villa Aconia, jour. Sallustius se tient dans l'atrium.
Sallustius (Criant.) Y a quelqu'un ? Oh !
Arthur (Arrive.) Ah, c'est vous...
Sallustius Y a pas la bonniche ?
Arthur Non.
Sallustius Elle est où ?
Arthur Je sais pas, quand je suis arrivé elle était déjà plus là.
Sallustius Et Aconia, elle est pas là non plus ?
Arthur Elle dort.
Sallustius Elle dort ? Et toi, qu'est-ce que tu faisais, toi ?
Arthur Comment ça, qu'est-ce que je faisais ?
Sallustius Bah je sais pas, je viens de te voir sortir de la chambre.
Arthur Bah... oui ! Parce que j'étais allé voir où elle est ! La baraque était vide...
Sallustius Et elle dort ?
Arthur Voilà.
Sallustius Mais, elle te... elle te donne des leçons, quand même ?
Arthur Oui oui, bien sûr. Mais... là elle dort.
Sallustius Bon. (S'allonge sur un divan.) Alors, qu'est-ce que t'as appris de beau ? Hein ? Les... les philosophes grecs, euh...
Arthur (S'allonge sur un divan.) Un peu, oui... le théâtre, surtout.
Sallustius Ah le théâtre, c'est chiant...
Arthur Un peu, ouais.
Sallustius Ouais ouais, ça me fait chier, moi. (Soupire.) Hein ? Sinon quoi, euh... euh... l'histoire de Rome ?
Arthur L'histoire de Rome, ouais. Ouais ouais.
Sallustius Depuis qui, depuis... cicéron ?
Arthur Ah bah... non non, depuis les... depuis les Tyrrhéniens !
Sallustius Ah oui ! Ah quand même ! Ah vous avez refait tout le...
Arthur Comme ça je suis équipé.
Sallustius Bon ! Alors voilà, euh... j'ai un problème. (S'assoit.) Et même un gros problème. Les... sénateurs peuvent pas te blairerblairer (v.) Supporter, apprécier
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.
Arthur Quoi ?
Sallustius Non. Et pour pouvoir te monter un grade au dessus de centurion, il me faut leur aval.
Arthur Oui mais pourquoi est-ce qu'ils peuvent pas me blairerblairer (v.) Supporter, apprécier
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, ils me connaissent pas ?
Sallustius Mais non, mais c'est parce que ils veulent qu'on suive le protocole, c'est tout...
Arthur Le protocole de quoi ?
Sallustius Pour obtenir une promotion exceptionnelle, tu dois accomplir un fait d'armes exceptionnel, voilà !
Arthur Un... fait d'armes exceptionnel ?
Sallustius (Acquiesce.)
Arthur Ah ouais, non mais ils sont bons, eux... je suis à l'urbaine, moi ! C'est pas en faisant mes patrouilles dans le ghetto que je vais me distinguer !
Sallustius Oui je sais, mais qu'est-ce tu veux... ils ont des principes, (mime le fait de suivre une direction droit devant soi) ils sont comme ça... comme tous les cons, ils sont... (refait le même geste) comme ça !
Arthur Bon ben... qu'est-ce qu'on fait, alors, on... on, on laisse tomber ?
Sallustius Ah bah non ! Ah bah non, tu vas accomplir un fait d'armes exceptionnel, ce sera beaucoup plus simple !
Arthur C'est plus simple pour qui ?
Sallustius (S'allonge.) Rome... accueille dans quelques jours un chef ennemi... un Ostrogoth... visite officielle, tout ça... la fiesta, tout le machin... tiens, ici d'ailleurs, hein...
Arthur Ici... ici ?
Sallustius Oui, ici ici ! Tu l'assassines, et puis c'est bon !
Arthur Quoi ?
Sallustius Tu l'assassines et puis c'est bon ! Tu t'organises comme tu veux, hein, tu fais ton équipe, tout ça...
Arthur Attendez, attendez, attendez... (S'assoit.) Vous voulez que... je butebuter (v.) Tuer
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un chef ostrogoth ?
Sallustius Ouais ! Et puis après c'est bon, comme ça je peux te bombarder dux bellorum !
Arthur Vous êtes complètement dingue.
Sallustius (Soupire et s'assoit.) Bon écoute, je... je te laisse réfléchir, hein, quand tu seras décidé tu viendras me voir, mais crois-moi j'y ai beaucoup pensé, euh... c'est la seule solution.
Arthur Non mais c'est... non. Non, c'est tout réfléchi. Ça suffit, maintenant, je vais pas buter un chef ostrogoth pour mériter un grade, c'est n'importe quoi !
Sallustius À toi de voir. (Se lève et part.)
Arthur (Soupire.)
Bureau de Glaucia, jour. Glaucia est assis à son bureau, un sac d'or devant lui. Desticius se tient debout à côté de lui. Devant eux sont assis Léodagan et Séli.
Desticius Je crois que je vous ai tout dit, euh... vous avez la journée pour réfléchir.
Glaucia Ce soir, si... si vous êtes d'accord, vous... vous signez le traité de paix... et vous repartez chez vous, avec ce joli pactole !
Desticius Et en prime, euh... vous êtes invités à une magnifique fête !
Glaucia Une fête de riches !
Desticius Avec des bonnes choses à bouffer !
Glaucia Des jolies femmes... enfin, si chez vous on a le droit de faire des... des écarts avec les femmes !
Léodagan En temps normal, oui.
Séli Oui mais là non. Donc ce soir, on doit aller chercher le pognon dans une fête.
Desticius Oui. Et signer le traité de paix, accessoirement.
Léodagan Moi juste, le truc que j'ai pas bien pigé, hein, pardon... c'est le coup de la romanisation. Alors après, c'est peut-être juste le mot qui fait que ça pue, hein, je...
Desticius Non mais ça, la... romanisation... non vous n'avez pas de souci à vous faire...
Glaucia (Amusé.) C'est... c'est du détail... la romanisation, c'est juste...
Séli Non mais... sans aller jusqu'à se faire du souci, vous pourriez nous refaire le topo, là-dessus ?
Léodagan Mmh.
Glaucia Euh... officiellement, si vous signez, vous... vous devenez un... un peu romains.
Léodagan Quoi ?
Séli (En même temps que Léodagan.) Quoi ?
Desticius Pour vous, ça ne change rien ! Vous pouvez continuer à manger les spécialités de chez vous, euh... alors, je sais pas si vous avez... des traditions...
Léodagan Euh, des traditions, euh... bousiller du Romain ?
Séli (À Léodagan.) Oh bah...
Léodagan Bah... si ! Euh... en un sens, si !
Séli Oui...
Glaucia Euh...
Taverne, jour. Le tavernier, entouré de clients, porte un toast. Perceval et Nonna sont assis à une table, avec un homme rougeaud et mal coiffé.
Le tavernier Ce n'est pas sans une certaine émotion... que je lève mon verre... à la mémoire de mon regretté père qui a ouvert cet établissement, y a trente ans jour pour jour. Tournée générale !
(Les clients acclament joyeusement.)
Le tavernier Et une tournée générale y en a qu'une ! La deuxième, c'est pour vos tronches !
(Les clients protestent.)
Nonna Et pourquoi est-ce que ça pourrait pas être votre coéquipier ?
Perceval (Désignant l'homme.) C'est même pas un aventurier ! Je vais pas me trimballerse trimballer (v.) Etre affublé d'une chose ou d'une personne partout où l’on va
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avec un type que je connais même pas !
Nonna On a dit qu'on vous trouverait quelqu'un, on va vous trouver quelqu'un.
Perceval Mais pourquoi spécialement un poivrot de la taverne ?
Nonna Mais j'ai pas dit spécialement un poivrot de la taverne ! Mais quand on n'est pas foutu de se trouver un coéquipier tout seul, on prend ce qu'il y a.
Perceval Non mais je veux pas partir à l'aventure avec lui !
Nonna Il a l'air très gentil.
Perceval Non !
Nonna Et très attentif ! Il a très bien écouté tout ce que je lui ai dit.
Perceval Il a rien écouté du tout, il est dans le coaltar ! Si ça se trouve il nous voit même pas !
Nonna Bon, bon. Hé ben on va en trouver un autre, puisque Monsieur Perceval veut faire de la peine à sa mamie. (À l'homme.) Excusez ! Pour mon petit-fils... vous n'avez pas la tête d'un aventurier !
Perceval Mais regardez, il dort ! Qu'est-ce que je vous disais ?
Nonna Ça va, ça va. Ça va. Là maintenant il dort. (Se lève.) Mais tout à l'heure... il dormait pas ! (Part.)
Perceval Ouais bah c'est n'importe quoi ! (Se détourne de l'homme, dégoûté.)
Dortoir de la caserne, jour. Arthur est allongé dans son lit, la Dame du Lac lui parle.
La Dame du Lac Il faut que vous acceptiez la mission.
Arthur Non. Voilà. Ça suffit. On arrête le tir, j'ai même pas eu le temps de rentrer dans mes pompes de centurion, il faut déjà que je change !
La Dame du Lac Bah ça vous plaît pas, de monter en grade ?
Arthur Mais c'est des grades à la con, ça ! C'est même pas sur le mérite !
La Dame du Lac Bah c'est pour ça qu'il faut que vous acceptiez cette mission, comme ça ce sera mérité !
Arthur Mais... il faut buter un gars... un chef barbare... c'est pas du mérite, ça !
La Dame du Lac Bah... pour Rome, ça l'air d'en être...
Arthur Bah vous avez qu'à le faire, vous. Comme ça vous monterez en grade...
La Dame du Lac Écoutez...
Helvia (Entre, tenant un laissez-passer.)
La Dame du Lac Pour ce qui vient derrière, c'est très important que...
Helvia Je dérange ?
Arthur Euh... non...
Helvia Non parce que vous parliez tout seul, donc euh...
Arthur Oui oui, non mais c'est normal, parce que je... récitais des poèmes.
La Dame du Lac (Disparaît.)
Arthur Alors... pardon, mais la caserne est interdite aux femmes, normalement...
Helvia J'ai un laissez-passer. Il faudrait que vous veniez avec moi.
Arthur Venir avec vous, mais où ça ?
Helvia Je peux pas trop vous le dire, mais venez.
Arthur Mais...
Helvia Mais, arrêtez de discuter ! C'est très important, vous venez, c'est tout !
Arthur Ah bon. Mais... pourquoi vous me dites pas...
Helvia De toute façon vous me croiriez pas. Allez, venez. Et mettez un uniforme complet.
Arthur (Se lève, perplexe.)
Taverne romaine, jour. Séli est assise sur le trottoir, Léodagan sort de la taverne avec une amphore.
Léodagan Je leur demande à boire, regardez-moi ce qu'ils me donnent ! Pardon de me répéter, mais ils sont quand même curieux, hein...
Séli Et vous, vous êtes pas curieux, vous ? Vous croyez pas que y a plus urgent à régler que la picolade ?
Léodagan J'ai trop chaud ! Je peux pas réfléchir !
Séli Hé ben vous feriez mieux de vous passer la tête sous l'eau... parce qu'il s'agit de jouer serré.
Léodagan Oh, et puis en plus... ils me cassent les pattes, avec leurs méthodes de vicelards, là... alors on a marché toute la matinée je sens plus mes pieds, et leur picrate attention hein !
Séli Non mais observez un temps de repos avec les jérémiades, s'il vous plaît ! Oh non mais au bout d'un moment, mais... qu'est-ce qu'il y a de si spécial ?
Léodagan Y a... y a de spécial... que je suis déstabilisé, voilà.
Séli Et un coup d'amphore sur le coin de votre bonnet, là... ça vous remettrait d'aplomb ?
Léodagan Je vais quand même pas traiter avec les Romains ! Je vais avoir l'air de quoi, après, en rentrant ?
Séli D'un traîne-la-grolle ! Mais ça vaut mieux qu'un traîne-la-grolle sans pognon ! Et je vous rappelle que votre père, quand il s'est agi de ramasser le fric des Romains... il s'est pas trop posé de questions !
Léodagan (Réfléchit.) Oui non, non mais ça a rien à voir, euh... c'était chez nous.
Séli Mais si les Romains sont assez débiles pour essayer de nous acheter deux fois, y a pas à discuter !
Léodagan Mais avec vous y a jamais à discuter.
Séli Parfaitement ! Alors profitez-en pour la boucler ! Pfiou...
Léodagan Non mais je suis désolé ! Signer une trêve, et puis après rentrer à la baraque en faisant croire que non, hein ? Euh... voilà.
Séli Oui, bah non, bah voilà ! Hé ben, on verra le moment venu !
Léodagan Mais « le moment venu » ? C'est quand, ça ?
Séli Quand on vous propose du pognon, vous prenez. C'est comme ça, c'est tout, c'est la règle, c'est simple. Et si dans un second temps, vous tenez absolument à réfléchir, bah rien ne vous empêche de vous amuser ! Mais d'abord... (Mime le fait de prendre quelque chose vers soi.) Cric !
Léodagan Oui oui oui oui... action, réflexion, euh... oui oui, oui oui ! Et je le sais, en plus, hein, euh... seulement voilà, voilà ! Je suis déstabilisé !
Séli (Exaspérée.) Oh là là, non... merde ! Là !
Léodagan Ah mais... (montre une petite quantité) y a ça, mais euh... ben oui, mais...
Chambre de Caesar, jour. Helvia s'adresse à Caesar, alors qu'Arthur attend dans le couloir.
Helvia Votre tranquillité ? Le centurion Arturus. (Revient vers Arthur.) C'est bon, vous pouvez rentrer. Vous vous asseyez sur le siège, en face du lit... et vous attendez qu'il vous adresse la parole. D'accord ? (Part.)
Arthur (Pénètre dans la pièce et va lentement s'asseoir, perplexe.)
Caesar (Amusé.) On m'a dit qu'il fallait que je t'impressionne. Ah... « L'impressionner... l'impressionner, l'impressionner... vous me faites marrer ! », que je leur dis... avec quoi est-ce que vous voulez que je l'impressionne, au juste ? Alors tu sais ce qu'ils ont fait ?
Arthur (Fait « non » de la tête.)
Caesar Non ? (Désigne sa chemise.) Ils m'ont mis une chemise propre ! Ouais... (Rit.) Tu dois te demander... « Qu'est-ce que c'est que ce vieux con qui me fait traverser la moitié de la ville pour me parler de ses limaces ? » Hein ? (Rit.) Hé ben le vieux con, il a sa tronche sur toutes les pièces de monnaie.
Arthur (Se lève, abasourdi.) Imperator ?
Caesar (Nostalgique.) « Imperator »... ah... voilà ! Ah, ça fait du bien, crénom... ah ! Ça me change de tous ces glands... « votre tranquillité » par-ci, « votre tranquillité » par-là... ah ça, dis donc... pour être tranquille... vingt-quatre heures sur vingt-quatre au plumard... à pioncer... à bouffer de la compote... ça... c'est sûr que j'enchaîne pas les crises de nerfs ! Bah assieds-toi ! On dirait que tu vas chanter une chanson ! Allez !
Arthur (S'assoit.)
Caesar Alors ? Milice urbaine ?
Arthur Bah oui...
Caesar Et avant ? La légion ?
Arthur Trois ans. En Afrique.
Caesar Qu'est-ce que tu préfères ? La légion ou la milice ?
Arthur Bah... la légion, parce que la milice, euh...
Caesar Bah oui, oh... elle sert à rien, la milice urbaine ! Je le dis depuis le début ! Il paraît que t'es fortiche, euh... en stratégie ?
Arthur Bah euh... j'ai tout lu, quoi.
Caesar Tout lu quoi ?
Arthur Comment, « tout lu quoi », bah... vos écrits, j'ai tout lu, je connais tout par cœur !
Caesar Mes écrits sur la stratégie ? (Pouffe de rire.) C'est que de la connerie !
Arthur Ah bah euh... non, quand même...
Caesar Oui non non, pardon, non... c'est pas de la connerie, mais euh... déjà, la moitié est pompée sur Sun Tzu...
Arthur Sur qui ?
Caesar Un Chinetoque. Ah là là... mmh, dis donc... ça me parait bien loin, tout ça. À l'époque, quand je levais le doigt, y avait... quinze mille soldats qui gueulaient « Imperator ! »... maintenant quand je lève le doigt, c'est pour aller pisser... ah... ça vieillit mal, les héros...
Arthur Ouais... ouais enfin, les connards aussi, ça vieillit mal. Moi... franchement, quitte à vieillir, je préférerais être un héros comme vous ! C'est comme les bouquins ! Vaut mieux les pomper sur les Chinetoques que de pas les écrire !
Caesar Te laisse pas faire, Arturus.
Arthur C'est-à-dire ?
Caesar J'en sais rien, je sais pas... fais-en ce que tu veux, démerde-toi... te laisse pas faire. C'est tout. C'est un ordre.
Bureau de Sallustius, jour. Sallustius est à son bureau, Desticius arrive en courant.
Sallustius Pourquoi t'arrives ici comme un pet ?
Desticius Hé ben je sais pas, y a un centurion qui emmerde le monde dans ton couloir, là...
Sallustius Un centurion ?
Servius Quel centurion ?
Desticius Hé ben j'en sais rien, mais enfin il veut rentrer, hein ! Enfin heureusement que y avait le garde... (Entend du fracas dans le couloir par lequel il est arrivé, et va se réfugier vers Sallustius.)
(Arthur et un garde arrivent ; le garde tente tant bien que mal d'empêcher Arthur d'entrer.)
Sallustius (Au garde.) C'est bon ! C'est bon, c'est bon ! Laissez-le, laissez-le ! Foutez le camp ! Foutez le camp ! Bon alors ? Qu'est-ce que...
Arthur C'est bon. Je la fais, votre mission.
Sallustius Ah.
Arthur Seulement c'est moi qui choisis mon équipe.
Sallustius Oui, OK OK !
Arthur Et il faut libérer Appius Manilius, parce que je le prends.
Servius Bah, euh... je m'en occupe...
Arthur Et si la mission réussit, je veux qu'il soit gracié. C'est ça ou je le fais pas.
Sallustius Accordé.
Arthur (Part.)
Desticius C'est ton Breton ?
Sallustius Oui.
Desticius C'est quoi, ta mission ?
Sallustius Qu'est-ce ça peut te faire ?
Desticius Oh allez... tu peux me le dire, quoi...
Cour de la caserne, jour. Desticius se déplace discrètement dans la caserne, jetant des regards de part et d'autre.
Bureau de Glaucia, jour. Glaucia est à son bureau, Desticius fait les cent pas devant lui. Procyon est assis dans un coin.
Glaucia Ah les fumiers... ils vont tout faire foirer !
Desticius Alors qu'est-ce qu'on fait ? Si Arturus tue le chef ostrogoth, Sallustius nous demandera de le bombarder général !
Glaucia Fumier de Sallustius... lui et son petit protégé, ils commencent vraiment à me courir !
Desticius Ah, on n'a pas l'air cons maintenant, avec notre plan pourri !
Glaucia (Tape sur son bureau et se lève.) Hé ben merde. Je suis responsable de la sécurité à la fête. Oui ou non ?
Procyon Bah... oui, et alors ?
Glaucia Ma responsabilité, c'est d'assurer la sécurité des invités, oui ou non ?
Procyon Bah oui, et alors ?
Glaucia Je suis pas censé connaître les combines de Sallustius, moi...
Desticius Oui bon, bon bah alors ? Tu le craches, ton noyau ?
Glaucia Je vais faire interdire les armes à l'intérieur de la villa. (Se rassoit.) Le voilà, mon noyau. Avec fouille systématique à l'entrée. Et invitations officielles obligatoires.
Couloir de la caserne, jour. Papinius écoute à la porte du bureau de Glaucia.
Bureau de Glaucia, jour. Glaucia est à son bureau, Desticius fait les cent pas devant lui. Procyon est assis dans un coin.
Procyon Alors... comment Arturus va tuer le chef ostrogoth, si il peut pas avoir d'arme ?
Glaucia Mais c'est justement pour qu'il puisse pas le tuer, abruti...
Desticius Et Sallustius ? Quand il apprendra que tu lui as mis des bâtons dans les roues ?
Glaucia Sallustius je l'emmerde ! Il a qu'à me tenir au jus de ses plans, si il veut pas que je lui mette des bâtons dans les roues !
Procyon Mais et moi ? Non parce que s'il faut que je tue le chef ostrogoth à la place d'Arturus, j'aimerais autant être prévenu, quand même...
Glaucia Toi tu fermes ta gueule. (Se lève.) Tu la fermes définitivement ! Tu fermes ta gueule, définitivement !
Procyon Oui, exactement, hein ? Tu fermes ta gueule.
Couloir de la caserne, jour. Papinius écoute à la porte du bureau de Glaucia.
Papinius (Par en courant, bousculant Caius au passage.)
Caius Hé mais qu'est-ce qui te prend, t'es marteau ou quoi ?
Papinius Vite ! Il faut qu'on aille prévenir les autres !
Caius Quels autres ?
Papinius (En panique.) Mais vite !
Caius Mais quoi, « vite » ?
Taverne, jour. Perceval, Nonna et Hervé de Rinel sont assis à une table.
Nonna Y a longtemps que vous êtes aventurier ?
Hervé de Rinel Ça fait à peu près trois semaines.
Nonna Trois semaines ?
Perceval Non mais allez...
Nonna Quoi ? Et vous ça fait combien de temps ? Vous êtes jamais sorti de chez votre père !
Perceval Oui mais moi, je débute.
Nonna Hé bah lui aussi, il débute.
Hervé de Rinel Attention, je débute... c'est... j'ai quand même trois semaines d'activité !
Nonna Et... est-ce que vous seriez prêt à prendre un partenaire ?
Hervé de Rinel Ça me pose aucun problème. Après, le truc c'est que... j'ai tendance à confondre les partenaires et les financiers.
Nonna De quoi ?
Perceval (En même temps que Nonna.) De quoi ?
Hervé de Rinel Ben je sais que c'est tous les deux des pâtisseries, mais...
Nonna Qu'est-ce que vous racontez ?
Perceval Attendez, je vais pas partir avec un aventurier de trois semaines qui confond les pâtisseries !
Nonna Hou... j'en ai marre de vous, hein ! Ras la collerette ! Je vais m'en jeter un au comptoir, parce que si je reste, je vous colle une quiche à tous les deux ! (À Hervé de Rinel.) Oui oui, vous aussi ! (Part.)
Hervé de Rinel Depuis que je suis aventurier, c'est la deuxième fois que je croise un maître du combat chinois.
Perceval De quoi ?
Hervé de Rinel Ben, votre grand-mère, là... c'est un maître chinois, non ?
Perceval Quoi ?
Hervé de Rinel Pardon. J'avais l'impression, parce que... elle se déplace un peu comme une mante religieuse...
Perceval (Observe sa grand-mère puis fait une moue perplexe.)
Villa Aconia, soir. Procyon, accompagné de plusieurs soldats, se tient devant Drusilla, qui garde l'entrée de la chambre d'Aconia.
Procyon Je suis désolé pour le dérangement, mais je dois fouiller toute la baraque.
Drusilla Vous fouillerez toute la baraque, mais pas cette chambre.
Procyon Pourquoi ? Elle fait pas partie de la baraque ?
Drusilla Mettons bien les choses au clair. Nous prêtons au palais... pour ses réunions, fiestas et autres goinfreries... la partie principale de la demeure. À savoir l'atrium. Qui s'étend de la porte... au petit salon.
Procyon Et alors ?
Drusilla Et alors, à partir du péristyle, vous vous trouvez dans la partie dite « privée », comprenant le péristyle, la chambre des maîtres, et diverses petites pièces dont l'accès est rigoureusement interdit aux emmerdeurs.
Procyon Oui mais moi, mes supérieurs m'ont demandé de fouiller toute la baraque.
Drusilla Hé ben vos supérieurs se verront contraints de modifier leur programme, personne ne rentre dans la partie privée.
Procyon Et si je rentre quand même ?
Drusilla Vous devrez trouver une autre villa pour votre fête.
Procyon (Acquiesce nerveusement, frustré.) Ouais... (Pointe un index accusateur contre Drusilla puis se retourne et s'adresse aux soldats.) Bon bah on vous dit que c'est privé, bon ça va ! (Part.)
Dortoir de la caserne, soir. Arthur, Papinius, Falerius et Caius discutent.
Falerius Qu'est-ce qu'on fait, on laisse tomber ?
Papinius Mais évidemment qu'on laisse tomber !
Caius Bah franchement, c'est mieux.
Falerius De quoi je me mêle, toi ? T'es même pas avec nous.
Caius Mais moi je suis à l'entrée, je te signale ! Et puis en plus, je pourrai pas vous aider, j'aurai Procyon sur le dos toute la soirée.
Papinius Mais personne te demande de nous aider... on a un laissez-passer.
Falerius Non mais on va pas y aller ! Arturus ! Comment tu vas le buter sans arme ? Tu vas pas l'étrangler ?
Papinius L'étrangler, c'est trop long ! La garde a trois fois le temps de lui sauter dessus !
Caius Bah vous pourriez lui mettre un super coup sur la tête avec un gros truc !
Falerius Et on le trouve où, le gros truc ?
Caius Bah, sur place ! Un... un meuble !
Papinius Un meuble ?
Falerius On va pas lui mettre un coup de meuble !
Arthur Mais arrêtez, j'en sais rien... (Soupire.)
Caius En tout cas, moi, je pourrai pas vous aider...
Falerius (Après un moment.) Qu'est-ce qu'on fait, on laisse tomber ?
Caius Mais évidemment, que vous laissez tomber ! Vous êtes que trois contre toute la garde de Glaucia...
Arthur On n'est pas trois, on est quatre.
(Caius, Papinius et Falerius se regardent, perplexes.)
Prison, soir. Manilius sort de prison.
Bureau de Glaucia, soir. Desticius place des pièces d'or dans un sac.
Appartement de Licinia, soir. Verinus sélectionne des citrons et pratique des entailles dans leur écorce.
Dortoir de la caserne, soir. Caius prie Mars.
Campagne, soir. Perceval et Nonna sont assis près d'un feu.
Devant la villa Aconia, nuit. Caius, Glaucia, Procyon et d'autres soldats surveillent l'entrée, la fête bat son plein à l'intérieur.
(Arthur, Manilius, Falerius et Papinius arrivent.)
Glaucia Tiens ! Regardez donc qui c'est qui vient faire la fiesta !
(Caius, Glaucia et Procyon s'approchent d'Arthur, Manilius, Falerius et Papinius.)
Procyon (À Arthur.) Pour commencer, on salue son supérieur. La hiérarchie, c'est pas pour les chiens.
Arthur Ave Titus Nipius Glaucia.
Caius Ave Arturus !
Glaucia Qu'est-ce qui te prend, toi ?
Caius Bah quoi, c'est mon supérieur, maintenant, Arturus...
Procyon La hiérarchie, c'est pas pour les chiens !
Manilius (À Procyon.) Bah et toi ?
Procyon Quoi, moi ?
Manilius Tu salues pas ton supérieur ?
Procyon (À contrecœur.) Ave Arturus. Ouais mais bon, à ce compte-là, euh... (à Caius) toi tu m'as pas salué !
Caius Ave Aulus Milonius Procyon. Enfin sauf que nous, on est arrivés ensemble, quoi.
Falerius Ouais mais nous, du coup, on doit en saluer une chiée, non ?
Papinius En plus, moi, je connais pas les noms complets...
Glaucia Vos gueules ! C'est une fête privée. Vous êtes priés de foutre le camp !
Arthur On est invités, figure-toi. Tout ce qu'il y a de plus officiel. (Lève la main.)
Manilius (À Falerius.) Laissez-passer.
Falerius (Donne le laissez-passer à Manilius.)
Manilius (Donne le laissez-passer à Arthur.)
Arthur (Donne le laissez-passer à Glaucia.)
Glaucia Pas besoin, je sais ce qu'il y a dedans. (Donne le laissez-passer à Caius.)
Caius Sans l'ouvrir ? Mais comment vous faites ?
Procyon Je vais vérifier... par acquit de compétence.
Caius Bah... sauf que toi tu sais pas lire, euh... ça va pas te gêner ?
Glaucia (Donne le laissez-passer à Procyon.) Tiens, mets-le-toi quelque part, ça t'occupera.
Arthur Allez, laisse-nous entrer.
Procyon Minute !
Glaucia Y a du changement.
Caius Ouais, faut que je vous fouille...
Manilius Quoi, c'est une blague ?
Glaucia J'ai pris sur moi de faire interdire les armes à l'intérieur de la villa. Par mesure de sécurité.
Manilius On n'en a pas, des armes !
Papinius On a tout laissé à la caserne !
Procyon On va quand même vérifier !
Caius Je suis obligé... (Fouille Papinius.)
Glaucia (Se place devant Arthur.) Avec ou sans armes, je vais te faire surveiller de très près, Arturus. De très très près.
Papinius (Pète.)
Caius Oh !
Papinius Mais quoi ?
Caius Comment, « quoi » ?
Falerius (À Caius.) Y a un problème, gros faisan ?
Caius Je commence à le fouiller, et il me pète dessus ! Faut pas exagérer, non plus, hein...
Papinius J'ai pas fait exprès...
Caius Ouais, à peine...
Falerius T'as qu'à pas nous fouiller !
Glaucia La ferme ! (À Arthur.) De très très près.
Villa Aconia, nuit. Arthur, Manilius, Papinius et Falerius pénètrent dans l'atrium, où la fête bat son plein.
Arthur (À Manilius.) Alors je crois que c'est celui du milieu, là, regardez discrètement...
Papinius Tu crois, ou t'es sûr ?
Falerius Parce que si tu te plantes de mec...
Arthur Ouais non non mais c'est lui, c'est bon. Allez, dispersez-vous. On attend l'arrivée de Verinus.
(Arthur, Manilius, Falerius et Papinius se dispersent.)
(Glaucia et Procyon observent l'atrium.)
Procyon Bon. Pour l'instant tout va bien, il est encore vivant.
Glaucia Qui ça ?
Procyon Bah... le chef machin, là, le... il est vivant !
Glaucia J'espère pour tes fesses qu'il va le rester... gros débile...
Procyon (Voyant Arthur entrer dans le couloir menant à la chambre d'Aconia, couloir gardé par Drusilla.) Hé ! Ho ! Hé ! (Se dirige vers Drusilla.)
Villa Aconia, nuit. Drusilla et un garde surveillent l'accès au couloir menant à la chambre d'Aconia, dans lequel Arthur vient d'entrer.
Procyon (Siffle pour indiquer au garde de partir, puis s'adresse à Drusilla.) Je comprends pas, là... je croyais qu'on n'avait pas le droit d'aller dans la partie privée ?
Drusilla Bah lui il peut.
Arthur Je vais saluer ma préceptrice.
Procyon Il va saluer quoi ?
Drusilla Vous deviez pas surveiller vos chefs barbares, vous ? (Désigne l'atrium d'un signe de tête.) Parce que c'est par là, que ça se passe. (Suit Arthur dans le couloir.)
Procyon (Soupire, agacé, puis observe Arthur longer le péristyle et siffle pour indiquer au garde de revenir surveiller l'accès au couloir.)
Villa Aconia, nuit. Desticius est assis et veille sur son sac. Lurco est allongé près de lui et le provoque, Flaccus est assis derrière eux et se sert du vin.
Lurco (À Desticius.) Mais qu'est-ce que tu trimballes, là, vieux machin ? Pourquoi t'as pas laissé tes sacoches à l'entrée ?
Desticius Qu'est-ce que ça peut te foutre ?
Flaccus (Ivre.) Euh, vous allez pas commencer, hein... (À Desticius.) Et toi tu pourrais répondre poliment...
Desticius Merde !
Flaccus Oh...
Desticius Hein ? Ça vous va ?
Flaccus Mais non mais... qu'est-ce que t'as ? Tu vas pas bien ou quoi ?
Desticius Mais fichez-moi la paix, je vous ai rien demandé !
Lurco Non mais ça pète l'ambiance, hein...
Flaccus (Acquiesce.)
Desticius Ambiance de merde !
Flaccus Ouais... oh, hé ! (Désignant une jeune femme.) Hé vous avez vu la jeune fille, là-bas ? Regardez-moi ce visage... on dirait un ange... (Fait un signe à la jeune femme, qui le regarde.) Hé, vous croyez que j'ai mes chances ?
Lurco Ben... ouais, avec les putes, si t'as un petit peu de pognon sur toi, t'as toujours tes chances, hein...
Flaccus Pourquoi ça serait forcément une pute ? Elle est peut-être invitée...
Lurco Ah oui ! Si ils ont invité des putes ! Moi je taperais bien dans un petit gars, là, mais... y a pas grand chose de propre. (Désignant Desticius.) Y aurait bien celui-là, là, mais... il a pas l'air bien d'humeur ! (Secoue le bras de Desticius.)
(Lurco et Flaccus rient.)
Desticius Oh, hé, ça va, hein !
Flaccus Ouais, moi je vais tenter ma chance même sans pognon. (Se lève.)
Lurco (Incitant Flaccus à rester assis.) Non non attends, laisse tomber, laisse tomber... ça, à tous les coups, c'est des putes qui sont réservées pour les chefs barbares, ça.
Flaccus Ah tu crois ?
Lurco Ouais.
Flaccus Ouais mais regarde, ils... ils les touchent pas !
Lurco Ouais mais ils vont les toucher plus tard. Sauf s'ils ont jeté leur dévolu sur notre belle petite reine de la nuit ! (Secoue le bras de Desticius.)
Desticius La reine de la nuit elle va te coller une dégelée là tu vas voir.
(Lurco et Flaccus rient.)
Desticius Oh, hé dis donc ! La reine de la nuit elle va te coller une dégelée, tu vas voir, toi...
Flaccus Oh vous faites chier, là... (Part en titubant.)
Villa Aconia, nuit. Verinus arrive, portant un sac.
Verinus (Pénètre dans un petit couloir.)
Villa Aconia, nuit. Pisentius est en grande discussion avec une jeune femme.
Pisentius Moi ce qui m'intéresse, chez la femme... c'est son hypothèse divine. Qui, mieux qu'une femme... peut représenter le sacré, elle qui a le pouvoir de créer la vie ? Bon, après... si y a moyen de baiser... je dis pas non.
Villa Aconia, nuit. Flaccus caresse le visage de la jeune femme sur laquelle il avait jeté son dévolu.
(La jeune femme repousse Flaccus.)
Villa Aconia, nuit. Assis autour de l'impluvium, le roi burgonde, le chef ostrogoth, Narsès et Sven boivent du vin.
Sven (S'étouffant à moitié.) Du vin, ça ? Moi... j'appelle ça de la pisse ! (Jette le contenu de sa coupe dans l'impluvium.)
Le roi burgonde (Hurlant.) De la pisse ! (Jette le contenu de sa coupe dans l'impluvium.)
Le chef ostrogoth Ouais, j'aurais dû apporter le mien... décidément ils savent rien faire, ces bâtards de Romains !
Narsès (Sortant une bouteille.) Tiens... je te fais goûter un peu de ma réserve personnelle.
Sven Et moi ?
Le roi burgonde (Hurlant.) Et moi ?
Narsès Non non, vous vous restez sur le jaja merdique, c'est juste pour mon pote l'Ostrogoth. (Au chef ostrogoth.) Hein ma gueule ?
Sven On... on mérite le respect !
Le roi burgonde Troupaskaïa !
Narsès Le respect, ouais, mais mon pinard perso, non ! (Au chef ostrogoth.) Vas-y, bois ! Profite !
Le chef ostrogoth Et après, on ira tuer des femmes, toi et moi...
Narsès (Mal à l'aise.) Tuer des femmes ! Voilà, c'est sympa ! Ouais pourquoi pas ?
Le chef ostrogoth Et on crèvera les yeux... à des petits chiots ! Ha !
Narsès Voilà, génial ! Non mais bois, sérieux, vas-y... bois, maintenant, voilà. Non il faut s'amuser quand on est jeune. Hein ? Vas-y, bois... sinon t'en es où ? Toujours la marave ?
Le chef ostrogoth Bah j'essaie de créer ma biographie, mais...
Le roi burgonde Biographie ! (À la jeune femme à sa gauche.) Biographie... (Place langoureusement un petit fruit dans la bouche de la jeune femme.)
Villa Aconia, nuit. Glaucia et Desticius observent la fête depuis un recoin discret.
Desticius Mais bon Dieu, qu'est-ce qu'il fout, ton chef breton ?
Glaucia Il va venir.
Desticius Ouais mais quand ? Combien de temps il va falloir encore que je coltine ce pognon ?
Glaucia Le temps qu'il faudra. Qu'est-ce que ça peut foutre ?
Desticius Ça peut foutre que j'en ai ma claque de tes combines ! Voilà.
Glaucia (Soupire et part.)
Villa Aconia, nuit. Assis autour de l'impluvium, le roi burgonde et Sven boivent du vin. Le chef ostrogoth dort profondément.
Le roi burgonde (Gobe un petit fruit et crache son noyau sur le chef ostrogoth pour le réveiller, sans succès.)
(Le roi burgonde, mais aussi Sven et les femmes à leurs côtés lancent des fruits secs sur le chef ostrogoth.)
Chambre d'Aconia, nuit. Arthur entre dans la chambre d'Aconia. Cette dernière est assise sur une chaise.
Aconia Tiens ? C'est l'heure de ta leçon ?
Arthur Non non. Non non non. Pardonnez-moi, je venais juste vous saluer. C'est vrai que j'en profite un peu pour euh... m'isoler deux secondes, parce que quand y a trop de monde, moi...
Aconia Assieds-toi !
Arthur (Se dirige vers le lit.)
Aconia Comment ça se fait que t'es invité ?
Arthur Bah, j'en sais rien... (S'assoit.) C'est le palais...
Aconia (Retire son collier.) Ils invitent pas les centurions, d'habitude !
Falerius (Hors-champ, du couloir.) Arturus ! Arturus !
Arthur Oui bah... quoi, entre ! (À Aconia.) Enfin...
Aconia (Acquiesce.)
Falerius (Entre.) Pardon... faut que tu viennes vite, là, y a un problème.
Arthur Un problème ?
Falerius Un problème.
Arthur Bon bah... j'arrive.
Aconia (À Falerius.) Vous êtes qui ?
Falerius Je dois dire mon nom ?
Arthur Non non, c'est bon... (Sort.)
Falerius (À voix basse.) Euh... je m'appelle Lucius Falerius. Ave. (Salue et sort, gêné.)
Villa Aconia, nuit. Le chef ostrogoth est toujours profondément endormi. Arthur et Verinus s'adressent à Narsès.
Narsès Je peux faire quelque chose ?
Arthur C'est possible, oui... tu le vois le mec de dos, là-bas ?
Narsès L'Ostrogoth, ouais !
Arthur Je rêve, ou... il a pas l'air super en forme ?
Narsès Ah non, je confirme, je viens de lui empoisonner sa gueule !
Arthur Quoi ? Mais c'est pas vrai !
Narsès Si, pourquoi ? C'est un pote à toi ?
Arthur Bon Dieu, mais c'est moi qui devais le buter ! C'est mon fait d'armes pour devenir dux bellorum !
Narsès Moi aussi !
Arthur Quoi, toi aussi ?
Narsès Moi aussi, c'est mon fait d'armes pour devenir dux bellorum ! À Byzance !
Arthur Oh c'est pas vrai... (Soupire.)
Verinus Comment on fait, alors, du coup, tu laisses tomber ?
Narsès Bah de toute façon, il va pas le buter une deuxième fois !
Arthur Le buter une deuxième fois. Exactement, c'est ça qu'on va faire, on va faire exactement ce qui est prévu.
Verinus Mais tu vas égorger un mec mort ?
Arthur Bah...
Narsès Il est pas mort depuis très longtemps...
Arthur Il faut que ces cons de sénateurs me voient, et puis après c'est bon !
Narsès T'expliqueras quand même qu'on l'a tué à deux, hein... sinon... je suis marron pour ma promotion...
Verinus Bon bah je vais faire le cri...
Arthur Quel cri ?
Verinus Bah le cri ! T'égorges un mec, si il crie pas... ça va faire toc !
Arthur Bon bah va pour le cri... ils ont assez de jus de citron, les gars ?
Verinus Ouais ouais ouais...
Arthur Non mais ils en ont vraiment assez ?
Verinus Mais non mais y en a trois fois trois, là ! Et attention, mon pote, hein... je t'ai ramené que de la qualité, hein, sélectionné selon l'acidité !
Arthur Non non mais ça va, ta gueule. Allez, on y va.
Narsès Euh... je suis désolé, hein, je voulais pas foutre la merde...
Arthur (Hausse les épaules, agacé, et part.)
Villa Aconia, nuit. Papinius se place discrètement à côté d'un garde, un petit bol de jus de citron à la main.
Falerius (Se place discrètement à côté de Glaucia, un petit bol de jus de citron à la main.)
Manilius (Se place discrètement à côté de Procyon, un petit bol de jus de citron à la main.)
Verinus (S'accroupit près du cadavre du chef ostrogoth.)
Chambre d'Aconia, nuit. Aconia passe la main sous son oreiller.
Aconia (Soulève les draps et les oreillers et constate que sa dague a disparu.)
Villa Aconia, nuit. Papinius jette du jus de citron dans les yeux du garde.
Manilius (Jette du jus de citron dans les yeux de Procyon.)
Falerius (Jette du jus de citron dans les yeux de Glaucia.)
Arthur (Égorge le cadavre du chef ostrogoth.)
(Les convives crient et courent de toute part.)
Verinus (Imite le cri d'un égorgé en masquant sa bouche.)
Le roi burgonde (Crie quelque chose d'indéfinissable.)
Manilius (Brise une amphore.)
Arthur (Tourne sur lui même en tenant la dague bien visible, pour être vu de tout le monde, puis lâche la dague et fuit.)
Villa Aconia, nuit. Arthur, Papinius, Falerius et Manilius prennent la fuite.
Arthur (Aperçoit Aconia dans le péristyle et la regarde.)
Aconia (Regarde Arthur, perplexe.)
Falerius (Hors-champ, de l'extérieur.) Arturus !
Arthur (Sort.)
Villa Aconia, nuit. Glaucia recouvre la vue et comprend la situation.
Glaucia Putain, ils ont foutu le camp par la grille du fond ! (Part.)
Desticius (Court à la suite de Glaucia.)
Villa Aconia, nuit. Glaucia et Desticius passent par le péristyle.
(Glaucia et Desticius sortent par l'arrière de la maison.)
Quartiers riches, nuit. Glaucia et Desticius courent après les fuyards.
(Venec et deux complices sortent de l'ombre et barrent la route de Glaucia et Desticius.)
Venec Hop hop hop hop hop hop hop !
(Léodagan et Séli arrivent par l'arrière, si bien que Glaucia et Desticius se trouvent encerclés.)
Léodagan Bon ! Voilà ! Donc, euh... on a bien réfléchi à votre proposition... on va prendre le blé.
Glaucia Mais... non mais pas maintenant, là !
Léodagan Ah, si. On le prend maintenant.
Séli Tout de suite, là.
Léodagan Si ça vous dérange pas.
Desticius Mais qu'est-ce que c'est que ce cirque, là ?
Glaucia On va pas signer la trêve dans la rue !
Venec Ouais, et on va pas non plus discuter pendant une plombe... je vous rappelle que c'est le couvre-feu...
Glaucia Bon bah laissez-nous passer, là...
Léodagan Non attendez ! On a rajouté un petit bonus...
Séli On prend le blé, mais... on ne signe pas la trêve.
Glaucia Quoi ?
Desticius (À Glaucia.) Mais fais quelque chose, grosse fiotte !
Glaucia Bah...
Venec Bon allez... si on s'y colle pas...
(Venec et l'un de ses complices assomment Glaucia et Desticius.)
Léodagan Hé ! Bah et moi ? J'ai même pas eu le temps de coller un marron, moi !
Venec Vous collerez des marrons en Bretagne. Allez, au bateau.
Séli (Saisit le sac de Desticius.) Ça y est, j'ai le blé !
Venec On largue les amarres dans un quart d'heure.
Séli Oh... hé oh, hé oh, hé oh ! Au prix où on le paie, votre bateau, on pourrait peut-être choisir les horaires de départ, non ?
Ferme à Vannes, matin. Karadoc et Lan, en tenue de voyage, arrivent près d'une cour de ferme où se trouvent Kadoc, Mevanwi, et un prétendant de cette dernière. Kadoc tient une poule.
Karadoc Oh oh ! Oh oh !
Lan Oh oh !
Mevanwi (Ignore Karadoc et Lan.)
Karadoc Bon, vous venez ?
Mevanwi (Agacée.) Qu'est-ce que vous me voulez ?
Karadoc Vous parler.
Mevanwi Mais non, j'ai pas le temps de vous parler !
Lan Vous avez jamais le temps de lui parler...
Mevanwi Exactement, j'ai jamais le temps de lui parler, et aujourd'hui non plus. Au fait, est-ce que vous pourriez faire en sorte que votre frère arrête de me suivre partout ?
Karadoc C'est moi qui lui ai demandé.
Kadoc C'est Karadoc il a dit.
Mevanwi Quoi ?
Karadoc C'est pour être sûr que vous allez pas voir du bonhomme, dans le genre de... celui-là, là-bas, là...
(Le prétendant fait une grimace outrée à Karadoc et se détourne.)
Mevanwi Vous êtes vraiment déglingué !
Kadoc Si Kadoc il surveille bien, il aura des petits cubes de fromage.
Mevanwi Débarrassez-moi de ce débile avant que je demande à mon père de le faire assassiner.
Karadoc Bon, euh... je vous fais le topo version condensée : le futur roi de Bretagne cherche du héros, il vient déjà d'en trouver deux.
Lan Il veut de la quête, il va en avoir !
Mevanwi Ah non... me dites pas que vous avez relevé le défi ?
Karadoc Ah mais carrément, qu'on l'a relevé... on part sur l'île pas plus tard que maintenant !
Lan Direct sur le mur d'Hadrien ! C'est ça notre quête.
Karadoc On va bousiller du Romain !
Lan Bousiller du Romain !
Karadoc Le roi, quand il va se pointer, on aura déjà tout nettoyé, et il aura plus qu'à foutre les pieds sous la table.
Mevanwi Mais non, vous allez pas partir en zone occupée...
Karadoc Ah ! On se fait un peu de souci quand même, hein, on n'a pas envie de le perdre, son futur mari !
Mevanwi (Feint de rire, moqueuse.) Mon futur mari...
Karadoc (À Lan.) Bah, vous voyez qu'elle a bon fond, quand même...
Lan Mais j'ai pas dit qu'elle avait un mauvais fond... moi c'est le physique, qui me gêne ! Je trouve qu'un héros qui se marie avec une grosse cagette, c'est un peu dommage.
Mevanwi Hé ben c'est ça, foutez le camp ! Allez vous faire pulvériser !
Karadoc Minute !
Kadoc Bon on part, là ? Parce que Kadoc il doit suivre.
Mevanwi (Soupire.)
Karadoc Dernier avis. Un jour, je serai assis juste à côté du roi, et ça il faut que ça rentre dans votre petite tête. Parce qu'à ce moment-là, vous serez ma femme.
Mevanwi (Feint de rire, moqueuse.) Hé ben... on en reparlera à ce moment-là, d'accord ? (Part.)
Lan Sans blague... la fille de votre voisin, vous la trouvez pas plus jolie ?
Karadoc Non, c'est elle, faites-moi confiance. Bon, on se les bousille, ces Romains, là, ou on joue aux cartes ?
Lan Bah c'est parti !
Karadoc Allez, feu ! À la cour !
Kadoc (Flanque une claque au prétendant de Mevanwi.)
(Le prétendant de Mevanwi tombe par terre.)
(Noir.)
Kadoc Elle est où la poulette ?
(Stab final.)
(Fermeture.)