Chambre d'Arthur, soir. Arthur et Guenièvre sont au lit. |
Arthur |
Je comprends pas comment on peut avoir peur des oiseaux. |
Guenièvre |
Ah, taisez-vous ! Rien que d'en parler, ça me... |
Arthur |
Non mais, qu'on ait peur des loups, à la limite... ou des dragons, ça, c'est rationnel, comme peur. |
Guenièvre |
Ben ceux qui ont peur des loups, ils ont pas forcément peur d'être attaqués ! Ils ont peur du rôdeur avide, du prédateur nocturne, euh... |
Arthur |
Ça je peux pas vous dire, j'ai pas peur des loups. Mais enfin bon, à la rigueur, je peux comprendre, oui... la nuit, la forêt, le fait de pas y voir, ça peut coller les miquettesmiquettes (n.f.) Désigne la peur En savoir plus. Mais enfin les oiseaux... |
Guenièvre |
(Grimace.) Ah ! Quelle horreur... |
Arthur |
Mais enfin, en plus c'est mignon, les petits moineaux, les petits machins... |
Guenièvre |
Ce sont des monstres ! |
Arthur |
Mais pourquoi ? Je comprends pas. |
Guenièvre |
Parce qu'ils ont pas de bras. |
Arthur |
Hein ? |
Guenièvre |
Ben ils ont pas de bras, les oiseaux. C'est affreux ! J'ai toujours l'impression qu'ils vont culbuter vers l'avant ! Ça n'a aucun sens ! |
Arthur |
Bah alors à ce compte-là, les serpents, c'est encore bien pire ! Ils ont pas de bras non plus, que je sache ! Ça vous angoisse pas, ça ? |
Guenièvre |
Ah non. Les serpents, ça me fait rien. |
Arthur |
(Reste perplexe.) |
Guenièvre |
J'ai jamais dit que c'était logique, hein ! |
Arthur |
Ah non, vous avez bien fait ! |
Salle à manger, jour. Arthur, Léodagan, Séli et Yvain mangent dans la salle à manger. |
Séli |
Qu'est-ce que vous avez fait de notre fille, aujourd'hui ? |
Arthur |
Elle mange dans sa chambre. |
Léodagan |
Ah bah c'est élégant ! On peut savoir pourquoi ? |
Arthur |
Depuis que vous lui avez dit que y avait des oiseaux qui tombaient du plafond, elle refuse de refoutre les pieds dans la salle à manger. |
Léodagan |
Oh non mais c'est pas possible, cette histoire ! |
Séli |
Non mais, comment j'ai fait pour élever cette gamine sans m'apercevoir qu'elle avait peur des oiseaux, moi ? |
Léodagan |
Oh bah si y avait que les oiseaux... elle est à moitié givréegivré (adj.) Fou En savoir plus, de toute façon. On peut pas tout relever, non plus, hein ! |
Séli |
Quand même ! J'aurais dû me rendre compte ! |
Arthur |
Soi-disant que les oiseaux, c'est horrible parce que ça a pas de bras. |
Léodagan |
Ah non mais qu'est-ce qu'il faut pas entendre comme conneries ! |
Séli |
(Désignant Yvain.) Celui-là, c'est pareil, j'ai pas l'impression qu'il ait quelque chose qui cloche... |
Léodagan |
Ah bah je sais pas ce qui vous faut ! |
Séli |
Je veux dire, comme peurs, quoi ! J'ai pas l'impression qu'il en ait... |
Léodagan |
Et bah et les guêpes ? |
Séli |
Quoi, les guêpes ? |
Yvain |
C'est même pas vrai ! |
Léodagan |
Dès que y a une guêpe qui lui tourne autour, il a peur qu'elle lui rentre dans la bouche ! |
Yvain |
Si elle pique dans la gorge on peut mourir, je vous ferais dire ! |
Léodagan |
Voilà, alors du coup il se met en apnée ! Vous vous souvenez pas de la fois chez son grand-père, il devenait tout bleu, on savait pas ce qu'il avait ? |
Séli |
Ah mais c'était ça ? |
Yvain |
Le cousin de Gauvain, il s'est fait piquer, il a fallu lui ouvrir le cou pour qu'il puisse respirer ! |
Séli |
C'est pour ça qu'il mange aux cuisines et qu'il met pas le nez dehors pendant tout l'été ! |
Arthur |
Entre celui-là qui mange aux cuisines et sa sœur qui mange dans sa chambre, vous avouerez que ça devient spécial... |
Chambre d'Arthur, soir. Arthur et Guenièvre sont au lit, Arthur somnole et Guenièvre brode. |
Arthur |
(Se réveille, confus.) Hein, qu'est-ce qui arrive ? (Aperçoit le foulard de Guenièvre sur le couvre-lit et prend peur.) Ah ! Qu'est-ce que c'est ça ? Qu'est-ce que c'est ça au bout du lit ? |
Guenièvre |
Mais quoi donc ? |
Arthur |
Vite, le truc, faites quelque chose ! |
Guenièvre |
Mais quoi, bon sang ? |
Arthur |
Le machin vert, là ! |
Guenièvre |
Mais c'est mon bandeau que je mets dans les cheveux ! |
Arthur |
Ah, la vache... |
Guenièvre |
Qu'est-ce que vous voulez que ce soit ? |
Arthur |
Non mais rien. C'est parce que... rien. Mais c'est parce qu'il est entortillé, on dirait un... |
Guenièvre |
Un quoi ? |
Arthur |
Rien, c'est bon, laissez tomber. |
Guenièvre |
(Taquine.) Vous auriez pas la trouille des serpents, par hasard ? |
Arthur |
Non mais ça va pas, non ? Qu'est-ce que vous allez chercher ? |
Guenièvre |
(Lance son bandeau sur la tête d'Arthur, qui panique.) |
Arthur |
Ah ! Qu'est-ce que c'est ? |
Guenièvre |
(Pouffe de rire.) |
(Fermeture.) |