La Botte Secrète II
❰ Livre II – épisode 79 ❱
Taverne, jour. Perceval, Karadoc et le tavernier sont à la taverne. | |
Le tavernier | Entre les taxes, les routes enneigées, les postes-frontières qui bloquent les livraisons, les bagarreurs qui viennent me dévaster la cabanecabane (n.f.) Maison, logis En savoir plus deux fois par semaine... j'étais déjà colère, mais là... je crois que j'ai atteint le... le paroxysme. |
Karadoc | (Regarde Perceval et lui fait un petit signe de tête.) |
Perceval | Ouais. C'est pas faux. |
Karadoc | (Sourit à Perceval et lève le pouce.) |
(Ouverture.) |
Taverne, jour. Perceval et Karadoc sont à la taverne. | |
Perceval | C'est quand même du velours cette botte secrète. |
Karadoc | C'est imparable. |
Perceval | Un mot compliqué, tac, « c'est pas faux », et tout le monde y voit que du feu. |
Karadoc | Le gars qui a pas beaucoup de vocabulaire, ça lui change la vie ! |
Perceval | Ah moi je l'utilise quinze fois par jour au moins. |
Karadoc | Attention ! Si ça se remarque, après c'est foutu ! |
Perceval | Ça se voit pas ! |
Karadoc | Et dans les conversations où y a que des mots difficiles ? |
Perceval | Bah j'arrête pas de dire « c'est pas faux ». |
Karadoc | Non, mais sans déconner, faites gaffe ! Parce que si les gens pigent la combine, après on va vraiment passer pour des gros cons ! |
Perceval | Bah si je comprends pas le mot ? |
Karadoc | Bon pour pas épuiser le truc, un coup en passant vous dites que vous comprenez pas le mot. |
Perceval | Ah bon ? Mais on passe pas pour des glandsgland (n.m.) Imbécile En savoir plus ? |
Karadoc | Bah une fois de temps en temps, faut se dire, tant pis, aujourd'hui, je passe pour un glandgland (n.m.) Imbécile En savoir plus. |
Perceval | Ouais remarquez ça va, c'est pas comme si on passait pour des glandsgland (n.m.) Imbécile En savoir plus tous les jours. |
Salle à manger, jour. Arthur et Perceval mangent dans la salle à manger. | |
Arthur | Qu'est-ce que vous voulez, ça me fait pas plaisir moi de taxer, hein. Si je pouvais annuler toutes les taxes, je le ferais. |
Perceval | De toute façon faut pas les écouter les pécorespécore (n.m.) Paysan En savoir plus, ils sont jamais contents. |
Arthur | Les taxes, c'est censé être utilisé pour régler les problèmes des paysans. Et quand on les entend parler, leur seul problème c'est les taxes. Y a une vraie dichotomie, là. |
Perceval | Ouais c'est pas faux. |
Arthur | Et puis finalement ça gueule mais ça se fait quand même. Ils se révoltent mais ils paient plus ou moins, nous on utilise les fonds plus ou moins à bon escient... |
Perceval | Ah, c'est pas faux. |
Arthur | C'est-à-dire ? |
Perceval | Quoi « c'est-à-dire » ? |
Arthur | Qu'est-ce qui est pas faux ? |
Perceval | Bah ce que vous avez dit là, c'est pas faux. |
Arthur | Ouais. De toute façon faudra bien trouver un terrain d'entente, on peut pas avoir que des rapports belliqueux non plus. |
Perceval | Ouais, c'est pas faux. |
Arthur | (Regarde Perceval avec insistance, comprenant soudain.) C'est pas faux ? |
Perceval | Bah ouais. |
Arthur | Et vous êtes d'accord aussi pour dire que... la définition même des taxes, et les critiques qu'elles soulèvent forment une... dichotomie ? |
Perceval | (Après un moment.) Euh, c'est... non je connais pas, ce mot-là. |
Arthur | (Semble décontenancé.) |
Salle à manger, jour. Perceval et Angharad mangent dans la salle à manger. | |
Angharad | Ça me fait bizarre tout de même de dîner à la table des maîtres... |
Perceval | Ça risque rien, ils sont en Carmélide. |
Angharad | Bah oui, mais si ils le savaient, je me prendrais une de ces danses, moi ! |
Perceval | Pas forcément ! Vous êtes avec moi. |
Angharad | Vous avez raison. J'oublie que je dîne avec une des plus hautes autorités du royaume. |
Perceval | Euh vous savez, si Arthur me voyait bouffer à sa table, je me prendrais une grosse tarte dans ma gueule. |
Angharad | (Séduite.) Alors vous prenez des risque, là ? |
Perceval | Ils sont en Carmélide, et puis on fait de mal à personne ! |
Angharad | Heureusement que je vous ai. Qu'est-ce que je serais moi, sans vous ? Un pauvre hère. |
Perceval | Ouais, c'est pas faux. |
Angharad | (Heurtée.) Euh... vous savez, je m'accroche pas à vous par désespoir. |
Perceval | Ah bon ? |
Angharad | Je voudrais vous poser une question. Ça va vous paraître un peu osé, mais euh, il faut que je sache. |
Perceval | Allez-y. |
Angharad | (Gênée.) Je voudrais être certaine que vous ressentez la même chose que moi. Seigneur Perceval, est-ce que oui ou non, tout comme moi, vous vivez une idylle ? |
Perceval | Je connais pas ce mot-là. |
Angharad | (Déçue.) Vous voulez dire que nos sentiments divergent ? |
Perceval | Ouais, c'est pas faux ! |
(Fermeture.) |
Taverne, jour. Perceval et Karadoc sont à la taverne. | |
Perceval | C'est bien d'avoir affiné le truc, ça varie un peu. |
Karadoc | Vous avez eu besoin, ces derniers jours ? |
Perceval | Non mais c'est dingue, ils se sont tous mis à me sortir des trucs de fou, j'avais l'impression de parler à des bouquins. Alors là, boum, « c'est pas faux », « c'est pas faux », un coup de « je connais pas ce mot-là ». Comme des cons, ils étaient. |
Karadoc | Bien, bravo. |
Perceval | Moi dans la vie j'avais deux ennemis, le vocabulaire et les épinards. |
(Noir.) | |
Perceval | Maintenant j'ai la botte secrète, et je bouffe plus d'épinards. |
(Stab final.) |