Coin du feu, nuit. Arthur et Perceval sont assis devant la cheminée. |
Perceval |
Moi, au bout d'un moment, je veux bien faire des tas de choses, mais il faut être un minimum précis ! Le vieux m'a dit : « Tu feras vingt lieux vers le nord pour atteindre les pleines de la perdition. » |
Arthur |
Pourtant, moi ça me paraît clair ! |
Perceval |
Non mais parce que là, je vous le fais à ma sauce ! Déjà il m'a tout mis dans le désordre ce vieux con ! Exactement, il m'a dit : « Gna gna gna les plaines de la perdition, vingt lieux vers le nord, tu feras. » Vous allez pas me dire ! |
Arthur |
Je suis désolé mais ça change pas tellement le sens ! |
Perceval |
Ben si ! C'est ce que je vous dis ! Ça m'a changé le sens ! |
Arthur |
Non mais... Ça change pas le sens de la phrase ! |
Perceval |
Ben si ! Il a fait la phrase, mais c'était pas dans le bon sens ! |
Arthur |
Bon, écoutez ! Moi la seule chose que je vois, c'est que vous vous êtes encore débrouillé pour passer à côté d'une belle occasion d'en savoir plus sur le Graal ! |
Perceval |
Ah ouais, mais après, je l'ai perdu, le vieux. |
Arthur |
Non, écoutez ! Taisez-vous ! Vous êtes un naze ! Alors allez-vous coucher, je veux plus vous voir ! |
Perceval |
(S'en va, abattu.) |
Coin du feu, nuit. Arthur et sa conscience personnifiée sont assis devant la cheminée. La conscience d'Arthur a les bras croisés. |
Arthur |
(Regarde sa conscience.) Quoi ? |
La conscience d'Arthur |
(Ne répond rien.) |
Arthur |
(Insistant.) Quoi ? |
La conscience d'Arthur |
Rien ! J'ai rien dit ! |
Arthur |
Je peux plus le supporter. Je suis désolé, c'est physique. Je préfère qu'il se barrese barrer (v.) Partir, s'en aller En savoir plus, parce qu'il va s'en prendre une ! |
La conscience d'Arthur |
Non, mais après, vous gérez comme vous pouvez, c'est sûr, hein ! Vous êtes pas patient, vous êtes pas patient. |
Arthur |
Un renseignement capital pour le Graal ! Si cet abruti savait trouver le nord, ce soir, le Graal, je dormirais peut-être avec ! |
La conscience d'Arthur |
Non mais c'est sûr ! Non mais là, je crois qu'il a bien compris la leçon ! Ça m'étonnerait qu'il dorme, d'ailleurs ! Triste qu'il doit être de vous avoir encore déçu... |
Arthur |
Oui bon, ça va ! Où est-ce que vous voulez en venir ? |
La conscience d'Arthur |
Perceval, c'est comme un gamin. Et qu'est-ce que c'est, la plus grande peur des gamins ? |
Arthur |
Je sais pas... l'ogre des collines... la soupe de poissons... |
La conscience d'Arthur |
Être abandonnés. Et pour pas être abandonnés, ils sont obligés de correspondre, à ce que leurs parents leur disent qu'ils sont. |
Arthur |
J'ai rien compris. |
La conscience d'Arthur |
Perceval, vous n'arrêtez pas de lui dire que c'est un nul. Hé ben si il veut que vous continuiez à le reconnaître, il est obligé d'en être un. Quelque part, ça le rassure. |
Arthur |
Ça le rassure d'être un nul ? |
La conscience d'Arthur |
Tant que vous lui dites qu'il en est un, oui ! |
Arthur |
Ah ben elle pas mal, celle-là ! |
La conscience d'Arthur |
Attention, moi je vous cause subconscient, hein, euh, prenez-le pas au pied de la lettre ! |
Arthur |
Non mais je rêve ! Je me farcisse farcir (v.) Endurer, supporter En savoir plus le pire con du monde britto-romain mais c'est bon, c'est ma faute ! J'avais qu'à pas lui dire ! |
La conscience d'Arthur |
(Soupire, dépité.) On peut pas parler. |
Coin du feu, nuit. Arthur et Perceval sont assis devant la cheminée. |
Perceval |
Je l'ai toujours dit ! Faut arrêter ces conneries de nord et de sud ! Une fois pour toutes, le nord, selon comme on est tourné, ça change tout ! De toute façon, le vieux, si je lui retombe dessus, il mange un marron ! Ça, c'est obligé. |
Arthur |
Non mais c'est bien déjà, parce que vous aviez trouvé une piste. |
Perceval |
Qu'est-ce que vous dites Sire ? |
Arthur |
Bah... bon, vous avez pas pu donner suite, mais... vous aviez une piste. |
Perceval |
Mais Sire, euh... j'ai quand même tout foiré ! |
Arthur |
(Se faisant violence.) Non ! Parce que vous êtes tombé sur une personne peu précise, qui utilise des termes fluctuants, comme par exemple les points cardinaux... (Lève les yeux au ciel.) |
Perceval |
Quels cardinaux ? |
Arthur |
Hé ben le nord, le sud ! |
Perceval |
Ah mais ça vient de là, le nom ? C'est les cardinaux ! |
Arthur |
Bon, bref. (Sans grande conviction.) Vous êtes... un grand chevalier. |
Perceval |
(Tombe de sa chaise.) |
(Fermeture.) |