Cour du château, jour. Arthur et Bohort s'entraînent ; Bohort est crispé sur son épée. |
Arthur |
Non mais essayez de vous détendre, Bohort, enfin, vous êtes crispé sur votre épée, on peut rien faire comme ça ! |
Bohort |
C'est Excalibur, Sire... j'ai peur de me brûler ! |
Arthur |
Non mais... mais continuez de vous battre comme ça, vous allez finir par vous brûler, c'est sûr ! Relaxez les épaules, euh... détendez les bras. Détendez les bras, là ! Respirez ! Là, voilà. Le combat ça passe avant par le souffle, souvenez-vous de ça. (Indique à Bohort comment respirer.) Voilà, très bien, allez. On y retourne. |
Bohort |
(Se crispe de plus belle.) |
(Ouverture.) |
Cour du château, jour. Arthur et Bohort s'entraînent ; Bohort est raide et ne rend pas les coups. |
Arthur |
Faites un effort, Bohort, ça devient franchement n'importe quoi maintenant ! |
Bohort |
Une pause. J'ai soif, j'ai besoin de boire ! |
Arthur |
Enfin mais vous vous arrêtez toutes les trente secondes, une fois pour boire, une fois pour pisser, restez concentré deux secondes ! |
Lancelot |
(Arrive.) |
Arthur |
Tiens donc. |
Bohort |
Ah Seigneur Lancelot ! Vous me sauvez la vie. |
Lancelot |
Hé ben ça fera jamais que la quatrième fois... |
Arthur |
Marrant de vous voir là. |
Lancelot |
Marrant ? |
Arthur |
Bah c'est-à-dire à force de plus vous y voir, je m'étais dit que je vous y verrais plus... |
Lancelot |
Ah justement, c'est de ça dont je voulais vous entretenir. |
Arthur |
Ben je vous écoute. Bohort peut rester ? |
Bohort |
Non mais je peux partir ! |
Lancelot |
Il peut rester. |
Bohort |
Oui mais je peux partir. |
Arthur |
Oui mais vous restez. |
Lancelot |
Alors je vous rappelle pas notre accord, hein, j'assume à mi-temps mes fonctions à la cour de Kaamelott, l'autre moitié du temps je reprends ma place de chevalier errant... |
Arthur |
Ouais enfin en même temps vous me le rappelez un peu, là. |
Lancelot |
Justement. Tout ça... c'est fini. |
Arthur |
Fini ? |
Bohort |
À la bonne heure ! |
Arthur |
Ah non non non non non non non, pas de commentaires. |
Bohort |
Pardon. |
Arthur |
C'est-à-dire que vous revenez définitivement ? |
Bohort |
C'est magnifique ! |
Arthur |
La barbe ! |
Bohort |
Pardon. |
Lancelot |
Non, je pars définitivement. |
Bohort |
Quoi ? Mais c'est une plaisanterie ! |
Arthur |
Bohort vous la fermez ou je vous tire une beigne ! |
Lancelot |
Voilà. Bon après-midi, Sire. (Tourne les talons.) |
Arthur |
Hé, ho ! Ho ho ho ! Non mais vous vous foutez de ma gueule ou quoi ? |
Lancelot |
À propos ? |
Arthur |
À propos que vous me tournez pas le dos, déjà. Et puis vous pourriez développer un peu, ça me semble un minimum. |
Lancelot |
Qu'est-ce que vous voulez que je développe ? Vous n'êtes pas de taille à mener la quête du Graal, vous n'avez pas les épaules« avoir les épaules » (loc.) Avoir suffisamment de force, d'énergie, de compétences ou de moyens pour faire face à une épreuve En savoir plus. De plus comme vous êtes incapable de vous séparer de la bande de pantins ridicules qui vous sert de gouvernement, vous passez pour un faible et un laxiste aux yeux du peuple et des pays voisins... et puis je vous parle pas des dieux évidemment, ceux-là, s'ils pouvaient parler... enfin bref, voilà, je m'en vais. Je vais me débrouiller tout seul. Et même tout nu et sur un pied, j'irai toujours cent fois plus loin que vous et votre risible compagnie de crétins. (Tourne ostensiblement le dos à Arthur, puis part.) |
Bohort |
Mais enfin, faites quelque chose ! Vous n'allez pas le laisser partir comme ça ! |
Arthur |
(Brandit Excalibur et attaque frénétiquement Bohort, qui peine à contrer les coups.) |
Bohort |
Sire ! Sire ! |
Taverne, jour. Perceval et Karadoc boivent un verre. |
Perceval |
Fini ! Il s'est barré, il reviendra plus. |
Karadoc |
C'est dommage quand même. |
Perceval |
Ouais, c'était une bonne recrue. Bonne mentalité, le gars droit. |
Karadoc |
Bon après, est-ce qu'il avait les épaules« avoir les épaules » (loc.) Avoir suffisamment de force, d'énergie, de compétences ou de moyens pour faire face à une épreuve En savoir plus... |
Perceval |
Non mais c'est sûr. On subit une pression telle, faut avoir un équilibre de vie derrière. |
Karadoc |
Et une hygiène alimentaire irréprochable ! |
Perceval |
Le plus embêtant, c'est que ça va mettre un coup au moral de l'équipe. |
Karadoc |
Ouais, c'est chiant ça. |
Perceval |
Va encore falloir les porter à bout de bras. |
Karadoc |
Le drame d'aujourd'hui, c'est la fragilité de la condition humaine. |
(Perceval et Karadoc trinquent.) |
(Fermeture.) |