Boudoir, jour. Arthur et Guenièvre discutent. |
Arthur |
Si, on déjeune tous ensemble, et je me barre avec vos parents après bouffer. |
Guenièvre |
Ah, d'accord, non mais si c'est ça j'y vais hein... |
Arthur |
Attendez je comprends pas, qu'est-ce c'est qui allait pas ? |
Guenièvre |
Je sais pas comment vous dire. |
Angharad |
Que Madame parle franchement. |
Arthur |
Non mais, on vous a demandé le temps qu'il fait, vous ? |
Guenièvre |
Pour tout vous dire, je craignais un peu de me retrouver seule à déjeuner avec votre mère. |
Arthur |
Pourquoi donc ? |
Angharad |
(Pouffe de rire.) Monsieur le demande ! |
Arthur |
Monsieur le demande pas à vous ! |
Guenièvre |
Ne le prenez pas mal hein, mais votre maman me fait un peu peur. |
Angharad |
Elle fait peur à tout le monde. |
Arthur |
La barbe ! |
Guenièvre |
C'est tout de même un peu vrai, hein... |
Angharad |
(Goguenarde.) Elle fait même peur à Monsieur. |
(Ouverture.) |
Salle à manger, jour. Arthur, Guenièvre, Léodagan, Séli, Yvain et Ygerne mangent ensemble. |
Séli |
Dites mon gendre, n'oubliez pas de prendre un lainage pour la route, la Carmélide c'est pas le climat d'ici. |
Arthur |
Ben ça va, c'est pas la première fois que j'y vais quand même. |
Guenièvre |
Dommage que je sois obligée de rester ici, j'aurais volontiers passé deux ou trois jours à la maison. |
Gauvain |
Moi je vous laisse ma place hein, j'ai pas du tout envie d'y aller. |
Léodagan |
Vous le jour où on vous demandera votre avis, euh... |
Séli |
L'anniversaire de grand-père Goustan ça tombe une fois par an, alors quand ça tombe hé ben vous venez et puis c'est tout. |
Gauvain |
Grand-père Goustan à chaque fois que je vais le voir il me donne des coups de pied. |
Séli |
Hé ben, ça prouve qu'il vous aime bien ! |
Léodagan |
Moi toute mon enfance il a pas arrêté de me taper avec des bûches euh... il m'adorait. |
Guenièvre |
Enfin ça change rien, quand Dame Ygerne sera partie après déjeuner, hé ben je serai toute seule au château. |
Arthur |
Toute seule avec soixante larbinos, trois corps d'armes, deux milices et presque tous les chevaliers avec leur famille. |
Ygerne |
Et avec sa belle-mère, aussi. |
(Un silence pesant s'installe.) |
Arthur |
Mais euh, comment mère, mais... vous partez pas tout à l'heure ? |
Ygerne |
L'essieu de ma diligence est fendu. Il parait que ça serait très dangereux de partir. Vos ouvriers ont dit que ça serait réparé demain matin. Je reste. Nous allons passer une petite soirée ensemble avec ma belle-fille, entre femmes. |
Guenièvre |
Vous savez, si on fait fouetter les ouvriers, et qu'on menace de les brûler vifs, ils peuvent peut-être finir tout à l'heure, hein ? Non ? |
Arthur |
(Fait « non » de la tête.) |
Guenièvre |
Oh bon ben, je vais... pleurer un petit peu. (Prend la main d'Arthur et pleure.) Excusez-moi... |
Coin du feu, nuit. Guenièvre et Ygerne sont assises devant un feu de cheminée. |
Ygerne |
Est-ce que vous faites des cauchemars, ma bru ? |
Guenièvre |
(Souriant poliment.) D'ordinaire non, mais après cette soirée y a de bonnes chances que je m'y mette. |
Ygerne |
Moi j'en fais qu'un. Toujours le même. Vous voulez que je vous le raconte ? |
Guenièvre |
Oh je vous en prie faites, ça fait tellement longtemps que je me suis pas évanouie dans mes urines ! |
Ygerne |
Je me vois réveillée dans ma chambre, inquiète, je regarde de tous les côtés, puis en m'habituant à l'obscurité, je m'aperçois que la porte d'entrée est restée entrouverte. |
Guenièvre |
Ah, ça y est, il arrive le pipi ! |
Ygerne |
Je me lève pour aller la refermer quand je prends conscience qu'à l'extérieur quelqu'un monte l'escalier en hâte pour atteindre la porte avant moi. |
Guenièvre |
Ça vous ennuie si je me taille les veines ? |
Ygerne |
Je me précipite, de l'autre côté les pas s'accélèrent, le rôdeur et moi atteignons la porte ensemble. Et je me réveille. |
Guenièvre |
C'est fantastique, vous pouvez arrêter ? |
Ygerne |
Allez, il va falloir songer à aller se coucher. |
Guenièvre |
Se coucher, oui bien sûr, une bonne nuit de sommeil hein ? |
Ygerne |
Ah non désolée, mon ancien amant vient me visiter. |
Guenièvre |
Votre ancien amant ? |
Ygerne |
Pendragon. |
Guenièvre |
Pendragon. Le même Pendragon auquel je pense ? |
Ygerne |
Oui, y en a qu'un ! |
Guenièvre |
C'est ça, celui qui est mort, donc. |
Ygerne |
Il arrive. |
Guenièvre |
C'est super, qu'est-ce que je fais, je lui prépare un petit frichtifrichti (n.m.) Repas rapidement préparé En savoir plus ? |
(Fermeture.) |
Coin du feu, nuit. Guenièvre et Ygerne sont assises devant un feu de cheminée. |
Ygerne |
Ça y est, il est là. |
Guenièvre |
Il est là, oh, c'est magnifique ! |
Ygerne |
(Devenue fantomatique et possédée par Uther Pendragon, brandit un index accusateur et le pointe lentement vers Guenièvre.) |
Guenièvre |
(N'ayant rien remarqué.) Bonsoir beau-papa ! Je suis enchantée de faire votre connaissance ! |
Ygerne |
(D'une voix d'outre-tombe.) Moi aussi ! |
Guenièvre |
(S'évanouit, ayant constaté la possession d'Ygerne.) |
(Noir.) |
Ygerne |
(Toujours possédée par Uther Pendragon.) Qu'est-ce qui lui arrive, à celle-là ? |
(Stab final.) |