Cour du château, jour. Arthur est dans la cour de Kaamelott avec Ygerne, des hommes portent la malle de cette dernière. |
Ygerne |
Alors c'est ça, Kaamelott ? Intéressant... |
Arthur |
Vous savez, mère, vos appartements vous attendent, hein. Vous venez vivre ici quand vous voulez. |
Ygerne |
Qu'elles sont claires, ces pierres ! |
Arthur |
Bah elles viennent d'une carrière du pays de Galles... elles sont comme celles de Stonehenge, j'ai pensé que ça ferait ton sur ton... |
Ygerne |
Et vous n'avez pas peur que ça fasse un peu tape-à-l'œil ? |
Arthur |
Tape-à-l'œil ? J'en sais rien... vous trouvez ça vulgaire ? |
Ygerne |
Vulgaire ? Oui ! Mais pas seulement... |
Arthur |
OK. Bon ben on va peut-être passer à table, vous devez avoir faim ? |
Ygerne |
C'est à cette heure-ci qu'on mange, chez vous ? |
Arthur |
Comment ça « chez moi » ? J'en sais rien moi, on mange quand on a faim ! Pourquoi, vous mangez à quelle heure, à Tintagel ? |
Ygerne |
À Tintagel, on mange quand on l'a mérité. Quand on sait qu'on a accompli ses commandements avec humilité et qu'on a glorifié sa famille. |
Arthur |
(Approuve sans conviction.) Oui, non... nous, on mange quand on a faim. |
Salle à manger, jour. Arthur mange dans la salle à manger, accompagné de Guenièvre, Léodagan, Séli et Ygerne. |
Arthur |
Vous mangez pas, mère ? |
Ygerne |
Tout ça est beaucoup trop riche pour moi. |
Guenièvre |
Si c'est le jus qui vous dérange, vous êtes pas obligée de saucer... |
Ygerne |
Ce qui me dérange, c'est l'opulence, la profusion... (À Arthur.) Du temps de votre père, avec ce qu'il y a dans mon assiette, on nourrissait dix soldats. |
Léodagan |
Du temps de son père, c'était la famine. Je peux vous dire que j'ai bien connu ! |
Séli |
Je vois pas le rapport. Maintenant, la bouffe, y en a... |
Guenièvre |
Du coup, je vois pas pourquoi on se priverait ! |
Ygerne |
Et c'est engorgé de sauce et de vin romain que vous menez vos hommes au front ? |
Arthur |
Ben disons que... avant de partir en campagne, j'essaie d'éviter les laitages, quoi... |
Guenièvre |
On lui fait préparer des petites galettes d'avoine qu'il emporte dans son barda. |
Ygerne |
(Moqueuse.) Au cas où il aurait une petite faim-faim ? |
Léodagan |
(À Arthur.) Dites donc, votre mère, c'est pas une rigolade hein ! Votre éducation, ça a dû être (mime un carré)... |
Ygerne |
C'est pas moi qui l'ai élevé ! Ça se voit. |
Arthur |
Bon, ça vous embête si on parle d'autre chose ? |
Ygerne |
Franchement, quand je vous regarde, j'ai peine à croire que le sang de Pendragon coule dans vos veines. |
Léodagan |
C'est vrai que c'était un sacré, le papa. Fallait pas venir lui souffler dans les narines« souffler dans les narines » (loc.) Importuner, agacer, exaspérer quelqu’un En savoir plus ! Vous lui marchiez sur le pied, il vous crevait un œil ! |
Arthur |
J'ai pas connu. |
Ygerne |
Ça se voit. |
Guenièvre |
C'est triste, quand même, de pas connaître son père... |
Arthur |
Attendez, j'en ai un, de père ! Un père adoptif, quoi... |
Ygerne |
Un fermier ! |
Arthur |
Mais il était pas que fermier, il était chevalier aussi ! |
Ygerne |
Un chevalier-fermier ? |
Léodagan |
(À Arthur.) Il était plus fermier que chevalier, quand même hein. |
Arthur |
(Agacé.) Bon bah ça va, maintenant ! Pendragon, Pendragon... il était sûrement très bien mais il était mort ! C'est quand même pas ma faute ! Alors arrêtez de me faire chier ! |
(Les autres restent silencieux.) |
Arthur |
Excusez-moi, c'est parti tout seul. |
Salle à manger, jour. Arthur mange dans la salle à manger, accompagné de Guenièvre, Léodagan, Séli et Ygerne. |
Guenièvre |
(À Arthur.) Mais qu'est-ce qui vous arrive, ce soir ? Vous picorez... |
Arthur |
(Sombre.) Rien, ça va. |
Guenièvre |
Ça vous plaît pas ? Vous voulez que je vous fasse préparer autre chose ? |
Arthur |
Ça va, je vous dis. |
Guenièvre |
Oh, c'est pas la peine d'être désagréable hein ! Si vous êtes mal luné, vous n'avez qu'à aller vous coucher ! |
Ygerne |
(À Arthur.) Et vous vous laissez parler comme ça ? Du temps de Pendragon... |
Arthur |
(Hors de lui.) Ah mais merde avec Pendragon ! « Fallait pas lui parler comme ci, il aurait jamais accepté ça, quand on lui marchait sur le pied, il vous crevait un œil... » Moi quand on me marche sur le pied, bah on me dit « pardon », et puis je réponds « c'est pas grave » ! Je suis pas une espèce de gros tarétaré (n.m.) Fou, dégénéré En savoir plus à qui on peut jamais rien dire ! Alors foutez-moi la paix avec ce con et (jette sa cuillère) finissez ce qu'on vous a mis dans votre assiette ! |
(Un silence pesant s'installe.) |
Léodagan |
(À Ygerne.) Vous mettez combien de temps, d'ici à Tintagel ? |
Ygerne |
(Piteusement.) Avec des chevaux frais, il faut compter un jour et demi... |
Guenièvre |
J'aurais dit moins loin, moi. |
(Fermeture.) |