Banc sous l'arbre, jour. Léodagan est assis sur un banc sous un arbre. |
Arthur |
(Arrive.) Bah ? C'est vous, beau-père ? |
Léodagan |
Tiens ! Bah qu'est-ce que vous fabriquez là à cette heure ? |
Arthur |
Ben, comme tous les jours à cette heure, justement, je viens coller mes michesmiche (n.f.) Fesse En savoir plus sur mon banc, au pied de mon arbre. |
Léodagan |
Ah ben oui, je vois l'ambiance... « Mon banc », « mon arbre »... trois possessifs par phrase, le ton est donné. |
Arthur |
Non mais, sans rire, qu'est-ce que vous glandez là ? |
Léodagan |
Ah bah rien de bien constructif, c'est sûr, hein ! Je prends le frais, je fais le point, je prends du recul... enfin, bah, tous les trucs de bonne femme quoi. |
Arthur |
Et vous pouvez pas aller faire le point dans le champ d'à côté ? Déjà y a le bon air, tout pareil, et puis en plus, j'y suis pas. Question recul, c'est plutôt tranquille ! |
Léodagan |
Mon bon souverain, je vous dirais déjà pour commencer que cet arbre, y a pas votre nom dessus, et d'une, que si j'ai envie de visiter les parcelles voisines, j'ai pas besoin de vos avis, et de deux, et que question recul, ça se passait pas trop mal jusqu'à ce que vous vous pointiez. Et de trois. |
Banc sous l'arbre, jour. Léodagan est assis sur un banc sous un arbre. Arthur se tient debout à côté. |
Arthur |
Non mais oui, c'est vrai, j'ai besoin d'être seul. Pour me détendre, pour penser à rien. Ça me permet de me recentrer sur les problèmes de l'État. |
Léodagan |
Ah parce que pour les problèmes de l'État, vous êtes centré ? Ah bah merci de prévenir ! C'est vrai qu'il est en pleine forme, l'État. C'est à se demander à quoi vous pensez quand vous pensez à rien ! |
Arthur |
Beau-père, écoutez, on va pas se fâcher, y a de raison ! |
Léodagan |
D'habitude, on n'a pas tellement besoin de raisons... |
Arthur |
Je vous demande d'aller vous trouver un autre coin que le mien. |
Léodagan |
« Le mien » ! Vous voyez, vous recommencez ! |
Arthur |
Écoutez, beau-père, cet arbre, il a plus de mille ans, je crois qu'il a jamais entendu autant de conneries qu'aujourd'hui. Moi j'y viens depuis des années pour être peinard, alors oui, tout le monde s'accorde à dire que c'est plus ou moins le mien. |
Léodagan |
Mais « le mien », « le mien », à plus de mille ans, c'est pas vous qui l'avez planté, si ? |
Arthur |
Ah mais d'accord, j'ai compris, vous avez décidé de m'emmerder, c'est ça ? |
Léodagan |
Mais pas du tout, j'étais là, moi ! C'est vous qui venez me les râper ! |
Arthur |
Bon ben alors voilà, beau-père, alors je suis désolé, vous m'obligez à utiliser mon autorité suprême, vous savez que j'aime pas ça, je vous donne l'ordre de lever vos fesses de là et d'aller vous trouver un autre coin. Voilà. |
Léodagan |
Ah bravo, bravo... non mais là, vous pouvez flamber, hein hé... |
Arthur |
Ah non mais ça me fait pas plaisir d'en arriver là, vous pouvez me croire ! |
Léodagan |
Bon, ben je vous le laisse, votre coin, là ! Sans regret ! D'ailleurs, si il vous plaît tellement, vous pourriez songer à venir y crécher définitivement ! Comme ça vous commenceriez à nous les lâcher un peu ! |
Arthur |
Vous allez me foutre le camp, oui ? |
Léodagan |
Tiens, je connais un petit bosquet de mûriers au poil ! (S'en va.) Bonne journée ! |
Arthur |
(S'assied sur le banc sous l'arbre et commence à lire.) |
Banc sous l'arbre, jour. Arthur est couché sur un banc sous un arbre. |
Léodagan |
(Arrive.) |
Arthur |
Encore vous ! Ah non, mais c'est pas vrai ! C'est la tauletaule (n.f.) Prison En savoir plus, que vous cherchez ? |
Léodagan |
Hé oh ! Une seconde, non ? Laissez-moi parler ! |
Arthur |
Ah mais qu'est-ce vous voulez ? Merde ! Je croyais que vous aviez trouvé un bosquet ! |
Léodagan |
J'y vais, vous inquiétez pas ! Seulement je suis allé me chercher un casse-dallecasse-dalle (n.m.) Casse-croûte, repas En savoir plus aux cuisines. Et comme vous êtes sur le chemin là, avec votre arbre, hé bah je me suis dit : « Tiens, je vais lui larguer un bout de pain au passage... » |
Arthur |
Ah bah, là, y a le beau geste. Pardon. |
Léodagan |
Non, mais bon... c'est comme ça, hein... |
Arthur |
Mais quand même ! Je vous ai connu moins fair-play ! Enfin, je vous interdis le périmètre et vous pensez à me ramener du singe... |
Léodagan |
Oui bon, vous prenez vous prenez pas ? |
Arthur |
Si si si, ouais, je prends. Non bah du coup, vous allez pas vous barrer, maintenant. Restez là.... |
Léodagan |
Ah non, je veux pas vous emmerder, hein. |
Arthur |
Mais vous m'emmerdez pas. Allez, c'est bon, je me recentrerai une autre fois, c'est pas les occasions qui manquent. Asseyez-vous, là. |
Léodagan |
(S'assoit.) Bien aimable. (Sort une miche de pain et la donne à Arthur.) |
(Fermeture.) |
Banc sous l'arbre, jour. Arthur et Léodagan sont assis sur un banc sous un arbre et mangent. |
(Un oiseau piaille.) |
Léodagan |
Tiens, c'était trop beau. |
Arthur |
Quoi, c'est le piafpiaf (n.m.) Oiseau En savoir plus qui vous ulcère ? |
Léodagan |
Ah, ils me gonflent, ces trucs ! Ça me tape sur le système ! |
Arthur |
(Ramasse une pierre par terre.) |
Léodagan |
Ben qu'est-ce que vous faites ? |
Arthur |
Bah, je vous le caillasse. Moi j'aime bien, mais si ça vous les brise, hein... (Vise et tire en direction de l'oiseau, qui s'envole.) |
Léodagan |
Ah ben, ça me gêne... |
(Noir.) |
Léodagan |
Je m'en voudrais de changer vos habitudes... |
(Stab final.) |