Le Repos Du Guerrier

Livre I – épisode 19

Salle de bain, soir. Arthur et Demetra prennent un bain ensemble dans une baignoire.
Demetra Ça fait trois soirs que vous restez avec moi.
Arthur Vous en avez marre ?
Demetra Oh bah non, au contraire. Mais c'est la reine.
Arthur Elle préfère, elle. Soi-disant que quand je reviens d'avec vous, je suis plus aimable et plus détendu.
Demetra (Réfléchit un instant.) Remarquez ça se tient hein. Quand vous revenez d'avec elle, vous êtes chiant et agressif.
(Ouverture.)
Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Bohort, Léodagan et Perceval sont assis à la Table ronde.
Bohort Et là, quand je me suis retourné... (à Perceval) excusez-moi Seigneur Perceval, je ne vous ai pas vu à votre poste.
Léodagan (Sévère.) Non mais n'ayez pas honte de le dire ! Vous l'avez pas vu parce qu'il y était plus !
Bohort (À Léodagan.) Je ne voudrais pas que mon témoignage serve à réprimander le seigneur Perceval, qui, par ailleurs, a toujours été un camarade dévoué.
Léodagan (À Perceval.) Alors, où est-ce que vous étiez encore fourré« être fourré (quelque part) » (loc.) Etre quelque part
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 ?
Perceval Bah j'étais pas bien loin !
Léodagan « Pas bien loin ». Pendant une charge ennemie, on tient son poste, nom de Dieu ! C'est pas le moment d'aller aux truffes !
Perceval Mais je suis pas allé aux truffes !
Léodagan Alors où ?
Perceval Bah je sais plus !
Bohort Mais ce qui compte, c'est que je m'en sois sorti quand même !
Léodagan Le roi va vous collercoller (v.) Donner, attribuer
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une de ces sentences, mon petit vieux, (à Arthur) j'espère qu'elle va être exemplaire hein !
Arthur Non mais c'est bon, il a compris, il le fera plus !
Léodagan (Surpris.) Quoi, c'est tout ?
Arthur Non mais ça va, il a bougé ! Alors voilà, ben oui, il aurait pas dû, la prochaine fois il bougera plus ! (À Perceval, paternel.) Allez ! Foutez-moi le camp.
(Perceval et Bohort se regardent, confus.)
Léodagan (Soupire.) Hé ben ! De temps en temps vous êtes souple !
Arthur Vous vous l'êtes jamais. Ça fait une moyenne.
Chambre d'Arthur, soir. Arthur et Guenièvre sont au lit, Arthur lit un parchemin et Guenièvre brode.
Guenièvre (Chante.) Belle qui tiens ma vie, captive dans tes yeux... qui m'a l'âme...
(Arthur l'accompagne en harmonisant.)
Guenièvre ...ravie, d'un sourire radieux... viens tôt me secourir, ou me faudra mourir...
(Arthur et Guenièvre rient.)
Guenièvre Vous êtes vraiment charmant aujourd'hui !
Arthur (Souriant.) Oh bah pas plus que d'habitude !
Guenièvre Oh vous voulez rire ? Chaque fois c'est pareil. Trois nuits chez Demetra, vous revenez métamorphosé.
Arthur Vous croyez que c'est ça, vous ?
Guenièvre Je me demande bien ce qu'elle vous fait...
Arthur Vous voulez vraiment qu'on parle de ça ?
Guenièvre Ah non non, c'est votre petit jardin secret !
Arthur Oui, j'aime autant, oui.
Guenièvre Je suis curieuse, c'est tout. Aujourd'hui, tout le monde vient me voir pour me dire que vous êtes bon et clément, et dans trois jours les mêmes viendront me dire que vous êtes inflexible et cinglantcinglant (adj.) Blessant
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 !
Arthur Qui c'est, qui vient vous voir pour vous dire ça ?
Guenièvre Bah qu'est-ce que ça change ?
Arthur (Contrarié.) Ça change que si quelqu'un trouve à redire à mon caractère, c'est pas à vous qu'il doit s'adresser !
Guenièvre À qui alors ?
Arthur À personne ! Il la ferme, et s'il est pas content il déménage !
Guenièvre (Blasée.) Vous voyez hein. Ça fait pas une demi-heure que vous êtes à côté de moi, vous êtes déjà en train de crier...
Arthur (S'emporte.) Oh mais lâchez-moi avec ça ! Je crie pas plus avec vous qu'avec les autres, vous me dites que y a des mecs qui viennent vous voir !
Guenièvre (Crie.) Mais je disais ça comme ça !
Arthur (Crie.) Mais vous dites toujours « ça comme ça » ! Ça me scie les nerfs« scier les nerfs » (loc.) Agacer ou exaspérer quelqu'un au plus haut point
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, moi ! « Vous êtes content, ah et puis dans trois jours vous serez pas content, vous irez voir machine vous serez re-content », merde là !
Chambre de Demetra, soir. Arthur et Demetra sont au lit. Arthur lit un livre.
Demetra Ça va ?
Arthur (S'emporte.) Ah vous, ne commencez pas à me faire chier, c'est pas le soir !
Demetra (Se tourne de l'autre côté.) Excusez-moi...
Arthur Non mais... (Soupire.) Non mais c'est pas contre vous...
Demetra (Se retourne vers lui, curieuse.) C'est contre qui ?
Arthur Mais c'est contre personne... (Prend Demetra dans ses bras.) Excusez-moi, j'aurais pas dû crier.
Demetra Ça va mieux ?
Arthur Mais bien sûr que ça va mieux, faut pas faire attention.
Demetra Bah je fais pas attention.
Arthur Bah voilà, ça va mieux. Tenez regardez. (Commence à chanter.) Belle qui tiens ma vie... (Attend que Demetra l'accompagne.) Ca... ptive... non ? Vous la connaissez pas, celle-là ?
Demetra (Étonnée.) Non...
Arthur Ah non ? Bah ça fait rien, c'est pas grave. (Embrasse Demetra sur le front.)
(Fermeture.)
Camp militaire, jour. Arthur et Léodagan sont en campagne et étudient une carte.
Arthur Mais qu'est-ce qui sent le cramécramé (n.m.) Odeur de brûlé ou de quelque chose qui brûle
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comme ça depuis tout à l'heure ?
Léodagan Peut-être la bouffe...
Perceval (S'approche d'eux.) Euh, Sire... vous avez dormi avec qui, cette nuit ?
Arthur Qu'est-ce que ça peut vous foutre ?
Perceval Parce que là sans faire exprès, j'ai foutu le feu à la réserve de flèches...
(Noir.)
Perceval C'est pour savoir si on en parle plutôt maintenant, ou si on attend demain.
(Stab final.)