Le Repos Du Guerrier II
❰ Livre III – épisode 37 ❱
Camp militaire, jour. Perceval et Karadoc se tiennent au milieu d'un campement enfumé où des soldats courent dans tous les sens ; Karadoc tient une brochette de saucisses. | |
Perceval | Vous pouvez pas faire gaffe, non ? |
Karadoc | C'est pas moi qui ai foutu le feu à votre tente ! Moi j'ai foutu le feu à la tente de commandement, sans faire exprès ! |
Perceval | Et ma tente, elle flambe pas peut-être ? |
Karadoc | Après, c'est pas de ma faute si y a des braises qui volent ! |
Lancelot | (Arrive vers Perceval et Karadoc, portant un seau.) Ça va ? Ils font pas trop de bruit, ceux qui éteignent le feu ? Sinon vous me dites, hein ! |
(Ouverture.) |
Camp militaire, soir. Arthur est dans un campement en forêt et étudie une carte. | |
Perceval | (Arrive.) Ça va, Sire ? |
Arthur | Vous êtes pas couché, vous ? |
Perceval | Non, j'ai pas sommeil... |
Arthur | Faites gaffe, hein ! Parce que demain on lève le camp une heure avant le lever du soleil ! |
Perceval | Ouais ouais, je sais mais... j'ai pas hyper sommeil. |
Arthur | C'est peut-être parce que vous avez rien glandé de la journée... |
Perceval | Ouais... et puis j'ai plus de tente pour dormir. Ça jouejouer (v.) Avoir son importance dans un contexte En savoir plus aussi. |
Arthur | Ah oui, c'est vrai. |
Perceval | Alors rien que de savoir que je vais coucher à la belle étoile avec le temps qu'il fait... j'ai pas sommeil. C'est... (montre sa tempe) voyez ? |
Arthur | Psychologique ? |
Perceval | Non, « psychologique », c'est tout ce qui est à la campagne, non ? |
Arthur | Non, ce qui est à la campagne, c'est « agricole ». Ou « rural ». |
Perceval | Non mais moi je veux dire que ça se passe... |
Arthur | Dans la tête, oui. « Psychologique ». Pourquoi vous n'allez pas dormir avec Karadoc ? |
Perceval | On s'est engueulés. Je lui ai dit qu'il était encore plus con que gros, alors il s'est foutu en rognerogne (n.f.) Colère, mauvaise humeur En savoir plus comme quoi il était autant l'un que l'autre, et puis c'est parti en vrille. |
Arthur | Vous voulez que je l'oblige à vous accueillir ? |
Perceval | Ça sert à rien. Rien que pour m'emmerder, il a mangé que des trucs qui font péter, exprès pour pas que j'aille dans sa tente. |
Arthur | Je sais pas bien quoi vous dire, moi là... |
Perceval | En même temps, ça fait longtemps qu'on n'a pas dormi sous la même tente, vous et moi, Sire... |
Arthur | Je pense bien, surtout qu'on n'a jamais dormi sous la même tente. |
Perceval | Bah ouais, du coup, ça fait longtemps. |
Arthur | Vous vous faites pas chier, quand même, hein... |
Perceval | Juste pour cette nuit, Sire. Je vous promets, je vous embêterai pas. |
Arthur | OK mais discret, hein. Vous êtes pas censé dormir sous ma tente. |
Karadoc | (Hors-champ, pète.) |
Perceval | (Hurle.) J'en n'ai rien à foutre, je dors dans la tente du roi ! |
Arthur | (Jette sa plume, dépité, et entre dans sa tente.) |
Tente d'Arthur, nuit. Arthur et Perceval sont couchés dans l'obscurité. | |
Perceval | (Murmurant.) Sire, vous dormez ? |
Arthur | Merde. |
Perceval | Ah bon. Je voulais vous demander un truc... |
Arthur | Quoi ? |
Perceval | Est-ce que vous croyez que y a des gens qui habitent dans une autre galaxie ? |
Arthur | Oui. |
Perceval | Ouais, moi aussi. Et vous croyez que y a des planètes où y a que des chevaux, et d'autres planètes où y a que des furets, et d'autres planètes où y a que des insectes ? |
Arthur | Non. |
Perceval | Ah ouais... moi, mon rêve, ça serait d'aller dans une autre galaxie. Quand je regarde le ciel, avec toutes ces étoiles, la voie lactée et tout, j'ai l'impression... |
Arthur | C'est marrant que vous sentiez pas le moment où il faut s'arrêter... |
Perceval | S'arrêter de ? |
Arthur | De me faire chier. |
Perceval | Ah je suis désolé, Sire, quand je m'embarque sur l'espace... |
Arthur | On se lève dans trois heures, vous pouvez la fermer ? |
Perceval | Ouais, ouais. Bonne nuit, Sire. (Après un moment.) Il paraît que le soleil, il est tellement chaud qu'une saucisse elle crame en même pas deux secondes ! Karadoc, il dit : « Ouais mais si on présente la saucisse à peine à peine et qu'on la retire tout de suite... » Moi, je lui ai dit : « C'est même pas la peine d'y penser ! Votre saucisse, elle devient toute noire, et en plus, vous vous cramez aussi, à moins de tenir la saucisse avec un super long bâton, mais pas en bois, sinon il crame aussi. » Sire, vous croyez qu'un jour ce sera possible d'aller dans l'espace ? |
Arthur | En tout cas si un coup de pied au cul suffisait, vous y seriez déjà. |
(Fermeture.) |
Tente d'Arthur, matin. Perceval dort profondément, Arthur tente de le réveiller. | |
Arthur | (Secouant Perceval.) Perceval. Perceval ! Allez. |
Perceval | (Se réveille.) |
Arthur | Allez, je vous ai laissé pioncerpioncer (v.) Dormir En savoir plus le plus longtemps possible, maintenant il faut se lever. |
Perceval | Oh là là... j'ai rêvé que j'allais dans l'espace ! J'arrivais sur une planète, et vous, vous étiez là ! |
Arthur | Ah bon ? |
Perceval | Ouais, et on se lavait sous une cascade ! J'avais de l'eau qui me tombait sur la tête ! |
Arthur | Non mais c'est moi, ça. |
(Noir.) | |
Arthur | Je vous ai balancébalancer (v.) Lancer, envoyer, expédier En savoir plus un seau d'eau pour que vous arrêtiez de ronfler. |
(Stab final.) |