L'Éclaireur
❰ Livre I – épisode 94 ❱
Camp militaire, jour. Arthur et Léodagan sont dans un campement en forêt. | |
Arthur | Donc, on n'a plus un seul éclaireur ? Ils sont tous morts ? |
Léodagan | Tous morts ou alors ils se sont fait des copains dans le camp ennemi, mais en tout cas ils sont pas revenus. |
Arthur | Alors qu'est-ce qu'on fait ? |
Léodagan | (Sans conviction.) Bon on pourrait envoyer le... seigneur euh... Perceval. |
Arthur | Vous avez rien de plus furtif ? Là, dans le genre discret... |
Léodagan | Bah non. |
Arthur | Parce que là, quitte à se faire repérer, on prendrait moins de risque à faire venir un orchestre... |
(Ouverture.) |
Camp militaire, jour. Arthur, Léodagan et Perceval sont dans un campement en forêt. | |
Perceval | Mais pourquoi vous me demandez ça à moi ? |
Arthur | Parce que là, y a que vous. Vous vous doutez bien que si on pouvait faire autrement... |
Perceval | Je sais même pas ce que c'est qu'un éclaireur, moi. |
Léodagan | L'éclaireur, c'est la pauvre pommepomme (n.f.) Individu naïf et idiot En savoir plus qui part avant tout le monde pour vérifier que la route est sure ou que les ennemis sont bien où on croit qu'ils sont. |
Perceval | Et c'est ça que vous voulez que je fasse ? |
Léodagan | Voilà. Mais on se fait pas d'illusion hein, vous inquiétez pas... |
Arthur | Non non. On aura déjà du bol si vous vous paumezse paumer (v.) Se perdre En savoir plus pas en route... |
Perceval | Oui, moi je sais pas me repérer... |
Arthur | Non mais on le sait, ça. On le sait. |
Perceval | Bon et une fois que je tombe sur les ennemis, qu'est-ce que je leur dis ? |
Léodagan | Ah non mais le but du jeu, c'est justement de pas tomber dessus, hein. |
Arthur | Euh... si. Si, en somme si, il faut qu'il tombe dessus, mais sans qu'ils le sachent. |
Léodagan | Ouais, euh... |
Arthur | Parce que si vous vous faites repérer, alors là, attention ! |
Léodagan | Alors attention, les Vandales, c'est pas des câlins hein ! |
Perceval | Les Vandales ? Mais qu'est-ce que c'est que ça, les Vandales ? |
(Arthur et Léodagan se regardent, atterrés.) | |
Léodagan | C'est les envahisseurs hein, les Vandales. Ça fait juste un mois et demi qu'on est en guerre contre eux. |
Arthur | Mais, rassurez-moi... vous en avez déjà vu, quand même ? Je veux dire, vous savez les reconnaître ? |
Perceval | Ben en fait, comme mon poste, c'est plutôt de sécuriser l'arrière du terrain... chaque fois que y a de la filochefiloche (n.f.) Combat, affrontement [non attesté] En savoir plus, je suis trop loin, je vois rien ! |
Forêt, jour. Arthur et Perceval marchent dans la forêt. | |
Perceval | C'est gentil de m'avoir accompagné, Sire. |
Arthur | Taisez-vous ! J'en reviens pas d'être obligé de donner des leçons de pistage avec tout le boulot qui me reste à faire au camp ! |
Perceval | Non mais vous me mettez sur la bonne voie, et après je me débrouille ! |
Arthur | Mais ça fait une heure et demie que vous me dites ça ! À chaque fois que je vous demande si c'est bon vous me dites « Non, encore un bout de chemin » ! |
Perceval | Mais c'est pour être sûr ! |
Arthur | (Soupire.) En plus je suis en armure complète, si j'avais su qu'on était partis pour quatre lieueslieue (n.f.) Ancienne unité de distance, une « lieue » équivalant à un peu plus de deux kilomètres En savoir plus, j'aurais enfilé autre chose, je vous jure ! |
Perceval | Mais moi j'ai bien gardé la mienne ! |
Arthur | Mais vous vous êtes un débile ! Cinquante fois, on vous a dit « Laissez votre armure au camp, ça va vous creverse crever (v.) Se fatiguer à l’excès dans l’exécution d’une action En savoir plus, vous allez vous faire repérer à cause du bruit ! » |
Perceval | Vous avez dit que moi de toute façon je me ferais repérer, alors... |
Arthur | Oui, ça, y a des chances, oui... |
Perceval | Du coup, quitte à me faire repérer, j'aime autant être en armure. |
Arthur | (Après un instant.) Oui ça se défend. |
Perceval | Bon alors qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? |
Arthur | Ah mais moi je fais rien du tout, moi je rentre au camp ! J'en ai marre, ça va bien maintenant ! |
Perceval | Mais je vais par où alors ? |
Arthur | Mais j'en sais rien, démerdez-vous ! Vous trouvez le camp ennemi et vous revenez ! |
Perceval | Mais par où, par là ? (Pointe la direction d'où ils viennent.) |
Arthur | Mais on en vient, de là ! C'est notre camp, là ! Ils sont pas là ! |
Perceval | J'ai pas le sens de l'orientation... |
Arthur | Tenez, un bon truc d'éclaireur, vous essayez de renifler une odeur de feu de bois. Ça, ça peut être leur camp. |
Perceval | Moi, j'ai pas bien d'odorat hein... |
Arthur | Sinon y a le bruit des chevaux, ça peut indiquer. |
Perceval | Pareil, je suis pas bien fortiche des étagères ! |
Arthur | Écoutez, si vous n'êtes pas capable de faire le moindre truc, vous n'avez qu'à passer le restant de vos jours dans une chaise à côté de la cheminée à peler des châtaignes ! Ah et puis je me cassese casser (v.) Partir, s'en aller En savoir plus, j'en ai ras le pif« en avoir ras le pif » (loc.) En avoir assez, ne pas pouvoir supporter davantage En savoir plus ! (Part.) |
Camp militaire, jour. Arthur, Léodagan, Karadoc et Perceval sont dans un campement en forêt. | |
Perceval | (À Arthur.) J'ai fait pile comme vous avez dit ! Tout au feu de bois ! |
Léodagan | Tout au feu de bois ? |
Arthur | (À Léodagan.) Ah non non non non, attendez, c'est compliqué.... |
Perceval | J'arrive à repérer le sens de la fumée, je marche, je marche, je marche... et boum ! |
Léodagan | Boum quoi ? |
Perceval | Boum, je tombe sur notre camp. |
Léodagan | Notre camp à nous ? |
Perceval | Bah oui, la fumée venait de chez nous. |
Arthur | Ouais. Ce qui est très étonnant d'ailleurs, vu que j'avais formellement interdit de faire le moindre feu justement pour qu'on se fasse pas repérer ! |
Karadoc | Non mais j'avais fait juste un tout petit feu pour faire cuire un truc, euh... je comptais l'éteindre tout de suite après... |
Perceval | Alors moi, je repère de la fumée, je me dis « Je suis sur la bonne voie », et boum ! |
Léodagan | Boum quoi ? |
Perceval | Boum, je tombe sur le seigneur Karadoc qui fait griller un bout de viande. |
Léodagan | Donc vous avez pas du tout repéré où étaient les Vandales ? |
Perceval | Ben non. Par contre, j'ai bien repéré où on était nous. Ça m'évitera de me paumerse paumer (v.) Se perdre En savoir plus à chaque fois que je vais pisser. |
(Fermeture.) |
Forêt, jour. Perceval marche seul en forêt en ajustant ses chausses. | |
Perceval | (Revient sur ses pas et regarde autour de lui, hésitant.) |
(Noir.) | |
Perceval | Hé les gars ! Où vous êtes ? Faites pas les cons ! |
(Stab final.) |