Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Léodagan, Séli et le père Blaise sont à la Table ronde. |
Léodagan |
Bah on était à quoi ? On était à... à cinquante lieues de, de, de, de... de la frontière ! |
Séli |
Oui... à peu près. |
Léodagan |
Et on croise deux pégus, sur les bords de la voie pavée, qui pataugeaient dans la bouse. |
Séli |
Ouais... |
Léodagan |
Bon. Et les gars, ils me regardent passer hein, avec des soucoupes comme ça ! (Écarte ses mains de vingt centimètres.) |
Séli |
Ah ouais, oh non mais... deux têtes d'ahuris, mais moi j'étais à côté je disais « Mais qu'est-ce qu'ils nous veulent, ceux là ? » |
Léodagan |
Alors moi je stoppe la carriole, et puis je leur demande d'arrêter le tir ! Hein, comme quoi s'ils veulent mon portrait, ben... je peux descendre pour leur montrer de plus près, enfin je sais plus hein, comment j'ai... j'ai tourné le truc... |
Séli |
Ouais ouais... oui, alors... bref, c'est là que les bouseux lui disent euh... « Vous êtes pas le seigneur Léodagan ? » |
Léodagan |
« Si », que je fais, « qu'est-ce que ça peut vous foutre ? » |
Séli |
Alors y en a un il se démonte pas, il dit : « On croyait que vous étiez décédé ! » |
Léodagan |
Ouais. « Mort » ! « Mort » ! « Mort ». |
Séli |
« Mort » ! « Mort ». |
Léodagan |
Bon alors là je m'énerve, je descends leur mettre des trempestrempe (n.f.) Coup, baffe En savoir plus, et boum, nous voilà repartis pour la Carmélide... |
Séli |
Mais arrivés en Carmélide, croyez-le ou croyez-le pas... |
Léodagan |
Tout le patelin était en deuil ! |
Séli |
En deuil ! |
Léodagan |
Ils s'apprêtaient à célébrer mes obsèques, ces cons ! Elle est choucarde, celle là, ou pas ? |
Le père Blaise |
Nous en tout cas, on a reçu beaucoup de lettres de condoléances... |
Arthur |
Oui. J'ai l'impression que... le phénomène est un peu... tout le monde croit que vous êtes mort, en fait. |
Le père Blaise |
Y en a beaucoup qui écrivent pour dire qu'ils sont contents, aussi. |
Arthur |
Ouais. |
(Ouverture.) |
Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Yvain, Gauvain et le père Blaise sont à la Table ronde. |
Le père Blaise |
Non mais vous vous rendez compte, que la grande porte de Kaamelott est restée sans protection pendant plus d'une journée ? |
Gauvain |
On ne se doutait pas que c'était si grave, mon oncle... |
Yvain |
C'est bon, ça faisait une semaine qu'on y était, on n'avait même pas croisé trois pélos... |
Arthur |
Non mais y a pas à discuter, je vous dis « vous surveillez la grande porte », vous surveillez la grande porte, c'est tout ! |
Le père Blaise |
Et si y avait eu une tentative d'invasion, hein ? Qu'est-ce qu'on aurait fait ? |
Gauvain |
Je suis vraiment confus, mon oncle. |
Yvain |
Non mais si il faut suivre les ordres au pied de la lettre, euh... c'est vraiment pas la peine. |
Arthur |
Bon, et on peut savoir ce que vous avez foutu, pendant tout ce temps ? |
Gauvain |
Nous étions en mission. |
Yvain |
Mmh. En mission dans les villages, je vous ferais dire. |
Le père Blaise |
Mais on vous avait pas donné de mission... |
Arthur |
Non, à part... la grande porte. |
Gauvain |
Non, c'est une mission que nous nous sommes donnée à nous-mêmes. |
Yvain |
Une mission autostipulée, alors euh... c'est bon. |
Le père Blaise |
Bon, et en quoi consistait cette mission, au juste ? |
Gauvain |
Nous nous sommes rendus dans tous les débits de boisson des environs, pour nous faire connaître des gens du peuple. |
Yvain |
Surtout qu'on a changé nos surnoms. |
Le père Blaise |
Mais ? |
Arthur |
Vous avez changé vos surnoms ? |
Le père Blaise |
Mais j'ai rien noté là-dessus, moi... |
Yvain |
Non mais... euh en fait, euh... on n'est pas fixés. Donc euh, c'est pour ça qu'on est allés le dire aux gens, pour voir leur réaction. |
Gauvain |
Assez bonne, dans l'ensemble. |
Arthur |
Donc, vous avez changé de surnoms. D'accord, alors... par exemple Yvain, vous c'est plus « Chevalier au Lion » ? |
Yvain |
Non. |
Gauvain |
Ah non, non... c'est moi, maintenant, « Chevalier au Lion ». |
Yvain |
Ouais. Moi, c'est « l'orphelin de Carmélide ». Franchement, je trouve que ça pète trop. |
Le père Blaise |
« L'orphelin de Carmélide » ? |
Arthur |
Mais... non, je comprends pas... depuis quand vous êtes orphelin, vous ? |
Yvain |
Non mais moi je tenais à ce que ce soit un animal. |
Gauvain |
Et là en plus ça raccorde avec une ancienne mission ! La fois avec les fakirs, là. |
Yvain |
Ouais moi ça m'avait marqué les... les bestioles avec les trompes, là... |
Gauvain |
(Mime un éléphant qui marche.) |
Arthur |
Les éléphants ? |
Gauvain |
Non non, les... les orphelins ! |
Yvain |
Ah non mais si, merde ! Non non si si, c'est ça ! C'est... c'est les éléphants. |
Gauvain |
Mais c'est pas les mêmes choses ? |
Yvain |
Bah de façon c'est la même famille ! |
Gauvain |
Ouais ! |
Yvain |
Ouais. |
Gauvain |
Ouais c'est ça. (Mime à nouveau un éléphant qui marche.) |
Yvain |
Non si c'est bon. |
(Fermeture.) |
Salle de la Table ronde, jour. Léodagan, retenu par Séli, arme une arbalète. En face, Yvain et Gauvain s'abritent derrière Arthur et le père Blaise, munis respectivement d'un bouclier et d'un registre. |
Léodagan |
Je vais vous en coller des obsèques, moi ! Des funérailles en grande pompe ! Les officiers en tenue de parade, les trompettes et tout l'équipement ! |
Séli |
Vauriens va, glandus ! Vous mériteriez je sais pas quoi ! |
Léodagan |
Non non non mais c'est bon, c'est bon, c'est bon, je m'en occupe de ce qu'ils méritent. |
Gauvain |
J'y suis pour rien, moi, hein ! |
Léodagan |
(Met son arbalète en joue.) |
Yvain |
Non mais c'est bon père, c'est bon, on fait comme avant ! Moi c'est « Chevalier au Lion » ! |
Léodagan |
Oh « Chevalier au Lion »... (Hurlant.) Chevalier de mes deux ! |
Arthur |
Attendez attendez attendez ! Moi je crois qu'il faudrait quand même récupérer un petit peu de calme, après tout, est-ce que tout ça est si grave ? |
Léodagan |
Oh bah pensez donc ! Non, en Carmélide en ce moment, ils sont en train de se mettre sur la gueule pour savoir qui va me succéder, c'est pas grave ! |
Séli |
(Peine à contenir Léodagan.) Ah, mais dans la rue on passe pour des revenants ! (Hurlant.) Et on se prend des gadins plein la poire ! |
Le père Blaise |
Attendez ! Je vais faire un petit erratum, et euh dans quatre jours, tout le monde sait que vous êtes vivants ! Hein ? |
(Noir.) |
Arthur |
Bon, y en a que ça va décevoir, mais euh... |
(Stab final.) |