Les Fesses De Guenièvre
❰ Livre I – épisode 72 ❱
Chambre d'Arthur, nuit. Arthur et Guenièvre sont au lit. | |
Guenièvre | Vous aimez bien les rousses, vous. |
Arthur | Ah bon ? |
Guenièvre | Ben oui, la fille qui était à table avec nous que vous avez pas arrêté de regarder... la fille de Calogrenant... moi... |
Arthur | Vous êtes rousse, vous ? |
Guenièvre | (Se touche les cheveux.) Ah bah un peu, oui, euh... |
Arthur | Comme quoi... |
Guenièvre | Comme quoi ? |
Arthur | Bah comme quoi c'est pas une question de cheveux. |
(Ouverture.) |
Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Perceval et le père Blaise sont à la Table ronde. | |
Le père Blaise | « ...et Arthur descendit dans la fosse maléfique le long de la corde tenue par son ami Perceval. » Jusque-là, c'est bon ? |
Arthur | Ah, jusque-là, oui. |
Perceval | C'est après que ça se gâte. |
Le père Blaise | Vous êtes pas arrivé en bas de la fosse ? |
Arthur | Ah si ! J'y suis même arrivé à fond de train« à fond de train » (loc.) Rapidement, à grande vitesse En savoir plus puisqu'il a lâché la corde. |
Perceval | Bah j'ai eu un petit mouvement de panique... |
Arthur | Bon, on va passer à autre chose si ça vous dérange pas parce que rien que de reparler de ça, ça va me mettre de travers« mettre (quelqu'un) de travers » (loc.) Contrarier, fâcher quelqu'un En savoir plus. |
Perceval | Oui, on va passer à une autre quête. (Au père Blaise.) Vous avez bien un truc à finir ! |
Le père Blaise | Ben... y a la fois ou vous avez confondu la potion de vérité avec une fiole de purin... |
Perceval | Ah non non non non, non pas ça... une quête où j'y étais pas ! |
Le père Blaise | Ah non non, ça c'est les deux quêtes qu'il faut finir aujourd'hui. Moi après je dois les enluminer... |
Perceval | Bon ben comme vous voulez, alors. (À Arthur.) Quand je lâche la corde ou la fiole de purin ? |
Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Perceval et le père Blaise sont à la Table ronde. | |
Le père Blaise | « Alors, Arthur prit le bouclier d'airainairain (n.m.) Alliage de différents métaux dont le cuivre est la base ; bronze En savoir plus et le brandit devant lui. Tous se courbèrent avec vénération : Léodagan de Carmélide, Calogrenant d'Écosse, le Gallois Perceval, Guenièvre à la blanche fesse et Angharad, sa suivante qui, bien que... » |
Arthur | Quoi ? |
Le père Blaise | Quoi, « de quoi » ? |
Arthur | Qu'est-ce que vous avez dit ? |
Le père Blaise | « Le Gallois Perceval ». |
Arthur | Non, après. |
Le père Blaise | Ah, « Angharad, sa suivante ». |
Arthur | Non, avant. |
Le père Blaise | Non je vois pas, je sais pas... |
Arthur | Vous avez parlé de ma femme. |
Le père Blaise | Guenièvre ? |
Arthur | Guenièvre, oui. Ma femme. Qu'est-ce que vous avez dit ? |
Le père Blaise | Ah oui, oui ! Je vois ce que vous voulez dire. Non mais en fait euh, c'est pas nécessaire hein, on peut l'enlever, c'est pas... |
Arthur | Je n'ai pas entendu ! Relisez-moi ce que vous avez écrit ! |
Le père Blaise | (Après une hésitation.) « Guenièvre à la blanche fesse ». |
Perceval | (À Arthur.) Ben qu'est-ce que ça fait, ça ? |
Arthur | Non mais c'est moi ou y a un truc qui déconne, là ? |
Le père Blaise | Non mais maintenant que vous en parlez, je me souviens. Quand je l'ai écrit, je me suis dit : « Attention, il risque d'y avoir un problème. » |
Arthur | Oui, et vous avez eu raison. |
Le père Blaise | Voilà, non parce qu'en fait, il faut bien comprendre que... faut pas le prendre au pied de la lettre. Hein, « Guenièvre à la blanche fesse », ça veut pas forcément dire que votre femme a les fesses blanches. C'est pas... |
Perceval | Ah bon ? Ah bah moi, je l'ai pris au pied de la lettre, alors. |
Le père Blaise | Non ! Non non, ça s'appelle une licence poétique. |
Arthur | Ça change quoi ? |
Le père Blaise | Que ça veut pas forcément dire ce qu'il y a marqué. |
Perceval | (Souffle.) C'est pour ça que je panepaner (v.) Comprendre En savoir plus rien aux livres, moi ! Ça veut pas dire ce qu'y a marqué ! |
Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Perceval et le père Blaise sont à la Table ronde. | |
Arthur | Mais blanches ou pas blanches, je m'en fous ! C'est pas le problème ! |
Le père Blaise | Bah c'est quoi, le problème ? |
Arthur | Le problème, c'est que j'estime que vous avez autre chose à foutre que de vous occuper des michesmiche (n.f.) Fesse En savoir plus de ma femme ! |
Le père Blaise | Mais c'est juste une tournure... |
Arthur | Une tournure à la con ! Alors vous allez me virervirer (v.) Se débarrasser de quelque chose En savoir plus ça vite fait ou vous prenez mon pied aux fesses ! On verra de quelle couleur elles sont, après ! |
Perceval | Attendez, on va pas rester là-dessus jusqu'à demain ! Est-ce qu'elle a les fesses blanches ou pas ? |
Arthur | Quoi ? |
Le père Blaise | (Exaspéré.) Mais non mais ça veut pas dire ça ! |
Perceval | Oui mais au bout d'un moment, ce qui faudrait peut-être arriver à savoir, c'est si c'est des conneries ou pas ! Sire, avec tout le respect, est-ce que la reine a les fesses blanches ? |
Arthur | Ben euh... |
Perceval | (Après un instant.) Vous savez pas ? |
Arthur | (Embarrassé.) Ben évidemment que je sais ! Simplement, c'est... non mais ça marche pas comme ça... déjà ça dépend du euh... comment. Si ! Parce que c'est la façon dont c'est euh... déjà ! Parce que... par exemple si c'est la nuit, on peut pas savoir... vous l'avez écrit la nuit, votre truc ? |
Le père Blaise | Non non, j'écris pas la nuit, moi... |
Arthur | Oui bah voilà, bah c'est ça. On peut pas savoir. |
(Fermeture.) |
Chambre d'Arthur, nuit. Arthur et Guenièvre sont au lit, Arthur lit un parchemin et Guenièvre somnole. | |
Arthur | (Pose son parchemin, soulève la couverture et regarde les fesses de Guenièvre.) |
Guenièvre | (Ensommeillée.) Qu'est-ce qui se passe ? |
Arthur | Rien. |
(Noir.) | |
Arthur | Vous pourriez prendre le soleil une fois de temps en temps, ça vous ferait pas de mal. |
(Stab final.) |