Taverne, jour. Arthur et Lancelot sont à la taverne, vêtus pauvrement, et boivent un verre. |
Lancelot |
Vous croyez qu'on peut y aller maintenant ? |
Arthur |
Deux secondes, j'ai les pieds gelés. |
Lancelot |
Ce que j'en dis c'est pour vous, hein... paraît qu'il faut pas se faire remarquer, que les chevaliers au bistrot, ça fait pas noble. |
Arthur |
Oui, mais j'ai les pieds gelés. Alors vous allez me lâcher et attendre que je me réchauffe. |
Lancelot |
De toute façon, dans l'état où elle est, la noblesse des chevaliers, je vois pas de quoi se faire de bile, hein... (Souffle avec mépris.) Les réunions de la Table ronde, vous pourriez les faire là, hein ! Avec un orchestre et puis des danseuses à poil sur une estrade, ça va gêner personne ! |
Arthur |
Je me demande bien ce que ça peut vous foutre, vous n'y mettez plus les pieds à la Table ronde. |
Lancelot |
Pas de temps à perdre avec des amateurs... |
Arthur |
Vous préférez chercher le Graal dans votre coin ? |
Lancelot |
Peut-être ! |
Arthur |
Sans indiscrétion, qu'est-ce que ça donne ? Ça touche au but ? Et vos séances de méditation là, dans votre cabane dans la forêt, ça marche bien, ça ? Vous êtes en train de nous trouver une solution ? |
Lancelot |
J'ai pas dit que je cherchais... |
Arthur |
Hé... venez pas faire votre caïd, parce que le Graal, la noblesse, la chevalerie, tout ça ça vous passe sous le nez comme aux autres. |
Lancelot |
(Piqué au vif.) Sauf que moi j'en suis digne ! |
Forêt, jour. Arthur et Lancelot marchent sur un sentier en forêt, sans cesser de boire. |
Arthur |
Un par un, c'est sûr, c'est facile d'être digne, hein... la difficulté c'est justement de mettre tout le monde au niveau ! |
Lancelot |
Mais parce que vous y croyez encore, à tout ça ? |
Arthur |
Mais c'est comme ça ! Apporter la lumière, c'est pour que tout le monde y voie ! Si c'est juste pour ma tronche, je vois pas l'intérêt. |
Lancelot |
Hé. On n'est pas tous au même niveau, quand même. Y a les élus, et puis y a les autres. |
Arthur |
Ah bon ? Et vous faites partie desquels, vous ? |
Camp militaire, jour. Arthur et Lancelot se tiennent dans un campement dans la forêt ; ils sont de plus en plus ivres. |
Lancelot |
(Ivre.) Vous allez pas me comparer aux autres débiles ? |
Arthur |
(Ivre.) Entre un débile et un être élu, y a une marge, il faut quand même pas exagérer, hein ! |
Lancelot |
Quand je dis euh... « être élu », c'est une façon de parler. |
Arthur |
Hé ben si la Dame du Lac venait vous visiter trois fois par semaine, vous verriez que c'est pas une façon de parler. |
Lancelot |
(Souffle avec mépris.) La Dame du Lac... |
Arthur |
Quoi « la Dame du Lac » ? |
Lancelot |
On la voit jamais ! |
Arthur |
(Criant.) Ah non, vous allez pas vous y mettre vous aussi, hein ? |
Lancelot |
C'est facile à ce compte-là ! Hein ? |
Arthur |
Et Excalibur ? C'est de la merde, peut-être ? |
Lancelot |
Excalibur... coup de bol ! |
Arthur |
Ah alors, ça y est, c'est ça ? Vous reniez tout du début à la fin ? |
Lancelot |
(Au bord des larmes.) Je suis fatigué... |
Arthur |
Hé ben et moi ? Je suis pas fatigué, peut-être ? Depuis que vous m'avez lâché, c'est deux fois plus dur qu'avant. |
Lancelot |
Mais je vous ai pas lâché... |
Arthur |
Je vais vous montrer un truc. Un truc que j'ai jamais montré à personne, hein. (Dégaine Excalibur.) Excalibur ! L'épée des rois. |
Lancelot |
Je sais. |
Arthur |
Ouais. Est-ce que vous savez aussi qu'elle revient toujours à l’élu ? |
Lancelot |
C'est une légende, ça... |
Arthur |
Non, non... c'est pas une légende. (Lance Excalibur loin devant lui.) Elle revient toujours à l'élu. |
(Excalibur s'anime sur le sol.) |
(Fermeture.) |