Raison D'Argent II
❰ Livre III – épisode 88 ❱
Salle de la Table ronde, jour. Arthur, Calogrenant et Léodagan sont à la Table ronde. | |
Arthur | Et puis de toute façon, lui, si on l'écoute, on n'a jamais un rondrond (n.m.) Pièce de monnaie, sou En savoir plus. |
Calogrenant | Y a que lui qui a le nez dans les comptes ! |
Léodagan | On a quand même autre chose à foutre que d'aller s'occuper des registres pour vérifier. |
Calogrenant | C'est lui que ça concerne, on est obligés de s'en tenir à ce qu'il dit... |
Arthur | Et pourquoi c'est lui que ça concerne ? Non mais alors quel rapport entre le fait d'être prêtre et tenir les comptes ? |
Léodagan | Non, bon c'est vrai que c'est plutôt nouveau ça ! Parce qu'avant les druides ils s'en foutaient du pognon, ils savaient même pas ce que c'était, alors... |
Calogrenant | Non mais là les chrétiens c'est pas pareil, ils aiment bien le fric. Il paraît même qu'ils sont forts pour ça. |
Arthur | Bah moi je vais aller voir s'il est fort ! Parce que moi aussi je sais compter hein ! Et puis euh... moi aussi je suis chrétien ! Même si ça fait pas longtemps ! |
(Ouverture.) |
Salle des coffres, jour. Arthur, Léodagan et le père Blaise se tiennent au milieu des richesses ; le père Blaise tient un registre. | |
Arthur | Bon alors ! |
Le père Blaise | Alors quoi ? |
Arthur | Alors où est-ce que vous voyez que y a pas de fric ? |
Le père Blaise | Ah bah je le vois dans mes registres ! |
Arthur | (Agacé.) Mais... je m'en fous, de vos registres ! Ça ne m'intéresse pas ! |
Léodagan | Non, vous énervez pas non plus... |
Arthur | Je m'énerve, si, parfaitement je m'énerve ! Parce que... on n'est peut être pas les plus fortiches, d'accord, mais enfin des batailles on en gagne, hein, des missions... on en réussit deux-trois, du pognon, d'un biais ou de l'autre on en rentre ! |
Le père Blaise | Oui, mais n'empêche que dans mes registres... |
Arthur | Mais collez-vous-les où je pense, vos registres ! Là ! Regardez plutôt devant vous, et venez me dire après en face qu'on est raidesraide (adj.) Ruiné, à court d'argent En savoir plus ! |
Le père Blaise | On est raidesraide (adj.) Ruiné, à court d'argent En savoir plus. |
Léodagan | C'est pas la peine de se mettre dans des états pareils ! De toute façon on va pas recompter à la main ! |
Le père Blaise | Y a pas à recompter, tout est dans les registres... |
Arthur | Et si vous vous plantez, du tout au tout ? Ça vous semble envisageable ça ou pas ? |
Le père Blaise | Une erreur est toujours possible, hein... c'est sûr dans l'absolu, faudrait vérifier. |
Léodagan | Vérifier... à la main ? Ah bah les croquants, ce sera sans moi ! |
Arthur | Mais bon Dieu de bon soir ! Mais avant de vérifier, regardez déjà ce que vous avez sous le pifpif (n.m.) Nez En savoir plus ! Moi je suis désolé, je suis déjà descendu dans des salles de coffres, hein, même à Rome ! Hé ben là, y a pas de quoi rougir ! |
Le père Blaise | Oui mais, vous pouvez pas estimer la fortune du royaume d'un simple coup d’œil... |
Arthur | Hé ben je vous le fais pas dire ! D'autant qu'ici on peut pas compter ni le pognon des alliés, ni le pognon des duchés fédérés ! À ce compte là, du pognon on en a en Orcanie, à Vannes, en Aquitaine, en Irlande, en Carmélide... |
Léodagan | Hé oh attention hein ! |
Arthur | Quoi « attention » ? |
Léodagan | Non mais euh... quand même ! |
Arthur | Quoi « quand même » ? Non mais, vous l'avez pas encore intégré ça, que votre pognon c'est avant tout celui du royaume ? |
Léodagan | Hé ben j'ai du mal ! Voilà ! Alors vous pourriez respecter ça, et pas me le sortir tout cru en plein milieu d'une conversation, euh... où on parlait d'autre chose, hein. |
Le père Blaise | Non on parlait de pognon... |
Léodagan | Oui ben pas du mien ! |
Arthur | Bref ! Au premier coup d’œil, il me semble à moi, ça vaut ce que ça vaut, que y a beaucoup moins de souci à se faire que vous le suggérez. Regardez-moi ça si c'est beau. Ha, sans blague ! Et ça, là ? Je sais même pas ce que c'est, un machin, truc bidule, un arrosoir, en or massif. J'en connais, ils auraient fondé une baronnie rien que là-dessus. |
Le père Blaise | Oui mais sauf que ça c'est pas possible, c'est à moi ! |
Arthur | Quoi ? |
Le père Blaise | Oui c'est à moi, je l'ai hérité d'un oncle, euh... je l'ai mis là un jour où je faisais visiter la cabanecabane (n.f.) Maison, logis En savoir plus, j'ai trouvé que la pièce était un peu vide hein, ça faisait clodoclodo (n.m.) Clochard En savoir plus, alors euh... j'ai mis des trucs à moi. Et puis en plus je crois que c'est même pas de l'or, c'est pas... |
Léodagan | Et vous l'avez pas repris ? |
Le père Blaise | Ah ben non il est... il est bien là, et puis en plus c'est gardé... |
Arthur | Bon bah bref, ça ou autre chose ! Les coffres là, c'est bien des rondsrond (n.m.) Pièce de monnaie, sou En savoir plus que y a dedans, je suis pas fou ! |
Le père Blaise | Oui mais les pièces ça fait du volume, mais mis bout à bout, je suis désolé ça fait pas tellement... |
Arthur | Vous vous foutez de moi ? |
Le père Blaise | En plus, là je les ai bennées en vrac là pour faire de la masse, mais si vous faites des petites piles comme ça, hé ben ce sera plus du tout la même impression, croyez moi. |
Léodagan | Bon écoutez, on va pas passer l'hiver là-dedans, puisqu'il faut compter pour savoir, hé ben comptons ! Ou plutôt faisons compter par des larbinslarbin (n.m.) Serviteur, domestique En savoir plus, ça les occupera. |
Arthur | Parce qu'ils savent compter les larbinslarbin (n.m.) Serviteur, domestique En savoir plus maintenant ? Première nouvelle ! |
Léodagan | Bon ben laissons tomber, quand on verra le fond des caisses, il sera toujours temps de se faire du souci ! |
Le père Blaise | Sauf que d'après le registre, je peux rien sortir pour la reconstruction de vos tourelles hein. |
Léodagan | Quoi ? C'est une blague ? |
Arthur | De toute façon j'ai pas confiance dans vos registres moi ! |
Le père Blaise | Bon ! Hé ben il faut compter. |
Léodagan | Bon. Ben je compte, moi. Alors... |
Arthur | (Tape sur un gong en or.) |
Léodagan | Non mais ça c'est à moi. |
Le père Blaise | Vous êtes sûr ? |
(Fermeture.) |
Salle des coffres, jour. Arthur, Léodagan et le père Blaise se tiennent au milieu des richesses. | |
Léodagan | Bon allez, d'après vous y a combien ? |
Le père Blaise | Je sais pas, il faut que je regarde dans mes registres. |
Léodagan | Non mais environ ! |
Le père Blaise | Honnêtement, je pourrais pas vous dire. |
Léodagan | Non mais à une vache prèsà une vache près (loc.) À peu près, environ. En savoir plus ! C'est pour se faire une idée. |
Le père Blaise | Je vais vous dire des bêtises ! Il faut que je regarde... |
Léodagan | Dites-nous en gros ! |
Le père Blaise | En gros je dirais... |
(Noir.) | |
Le père Blaise | J'en sais rien, il faut que je regarde... |
(Stab final.) |