Chambre d'Arthur, nuit. Arthur et Guenièvre sont au lit, Arthur lit un parchemin. |
Guenièvre |
Ça s'est bien passé, cette campagne ? |
Arthur |
« Ça s'est bien passé », c'est-à-dire ? |
Guenièvre |
Ça a pas été trop dur ? |
Arthur |
Ben... « Ça a pas été trop dur »... c'est une campagne, quoi. On n'y va pas pour euh... |
Guenièvre |
Vous avez dû avoir sacrément froid ! |
Arthur |
Ouais... (Après un moment.) Enfin, non. Non, je sais pas pourquoi je vous dis « oui ». Non on n'a pas eu froid puisque c'était plutôt la... c'était euh... |
Guenièvre |
Oui, c'est plutôt la belle saison. |
Arthur |
Oui voilà, oui. Donc bon. |
Guenièvre |
Et pour la nourriture, vous... |
Arthur |
Ouais, alors, non, simplement euh... je me disais un truc... on n'est pas forcément obligés de parler ! |
Chambre d'Arthur, nuit. Arthur et Guenièvre sont au lit. |
Arthur |
Non mais si vous avez quelque chose de très important à me dire, y a pas de problème ! (Montre son parchemin.) Mais là comme il faut que j'aie fini ça avant demain, sinon voilà... |
Guenièvre |
Ah... vous avez pas envie de parler ! |
Arthur |
Mais, c'est pas que j'ai pas envie de parler... |
Guenièvre |
Vous savez, on n'est pas obligés de parler... |
Arthur |
Bah voilà, je vous avouerais : ça m'arrange. |
Guenièvre |
Non je veux dire, on peut faire des choses sans parler, si vous voulez. |
Arthur |
(Après un instant.) Ah ! Ah oui, ça y est ! Ça y est, j'avais pas euh... d'accord. Oui mais non. Là non hein, ça honnêtement, je préfère pas. |
Guenièvre |
Ah c'est votre blessure qui vous fait encore souffrir ? |
Arthur |
(Réfléchit un instant.) Bah déjà y a ça ! Non mais c'est vrai parce que j'y pensais plus, mais maintenant que c'est presque guéri, ce serait quand même dommage de... voyez ? |
Guenièvre |
Ouais mais, je croyais bien faire... |
Arthur |
Non par contre c'est très gentil ! Ah non mais c'est très gentil ! Parce que bon, là, non. Mais euh... dans l'absolu, j'allais dire, non c'est vrai, « pourquoi pas ? » |
Guenièvre |
Mais vous comprenez, les dames de la cour n'arrêtent pas de me parler de leurs chevaliers qui reviennent toujours de campagne épuisés et qui dorment pendant trois jours ! |
Arthur |
Oui, bah ça les campagnes ça fatigue un peu, c'est sûr. |
Guenièvre |
Ah non mais surtout que c'est pas tant à force des campagnes qu'à force de piller et de mettre à sac et qu'il paraît qu'il y a les filles du coin qui aiment bien les envahisseurs, alors forcément, il se passe des choses euh... |
Arthur |
Oui enfin attention parce que ça c'est très exagéré aussi... |
Guenièvre |
Mais elles me disent aussi que vous, vous touchez pas à ça... et que vous refusez catégoriquement de porter la main sur les femmes des vaincus, et que du coup c'est romantique parce que vous me restez fidèle... |
Arthur |
Ouais... c'est une manière de voir les choses, oui... |
Guenièvre |
En même temps, je comprends pas tellement parce qu'elles savent bien que vous avez des maîtresses, mais elles vous trouvent quand même fidèle... |
Arthur |
Attention, parce que des maîtresses... enfin on dit « des maîtresses », j'en ai pas tout le tour du ventre« en avoir tout le tour du ventre » (loc.) Disposer d’une chose en grande quantité En savoir plus non plus hein, ça va. |
Guenièvre |
Alors je me disais, comme là, elles sont pas là... hein, ni Anna, ni Demetra, ni les jumelles du pêcheur... |
Arthur |
Oui oui bon, alors ? |
Guenièvre |
Hé ben si vous avez rien fait en campagne, ni à votre retour... mais ça doit faire un moment ! |
Chambre d'Arthur, nuit. Arthur et Guenièvre sont au lit. |
Guenièvre |
C'est quand même curieux que vous ayez pas envie... |
Arthur |
Non mais c'est... ça marche pas comme ça. Dans l'absolu je pourrais avoir envie, c'est pas la question. C'est une histoire de contexte. |
Guenièvre |
Ah c'est parce que c'est moi, c'est ça ? |
Arthur |
Mais non, qu'est-ce que vous allez chercher ? |
Guenièvre |
Non mais c'est sûr que je suis pas aussi bien mise qu'Anna... |
Arthur |
Mais si, voyons. Vous êtes très bien. |
Guenièvre |
Et donc, si dans l'absolu vous pourriez avoir envie... |
Arthur |
Oui ? |
Guenièvre |
Et que vous me trouvez bien... |
Arthur |
Et ben ? |
Guenièvre |
J'allais dire, bon à l'extrême limite hein, on pourrait quasiment envisager de... |
Arthur |
(À contrecœur.) Ouais à la limite, ouais... |
Guenièvre |
Ce serait formidable ! Toutes ces semaines de chasteté dans le froid et la faim... et puis vous revenez vers votre épouse au grand galop... |
Arthur |
Ouais enfin... je me suis fait buterbuter (v.) Tuer En savoir plus mon cheval, alors je suis revenu à pied, mais euh... enfin ça change pas le... oui, je vois ce que vous voulez dire oui, c'est... c'est le côté un peu... |
Guenièvre |
Ouais... |
(Fermeture.) |
Chambre d'Arthur, nuit. Arthur et Guenièvre sont au lit. |
Guenièvre |
Bon, alors euh... à la limite, vous vous bougez pas, hein ! C'est mieux pour la blessure ! |
Arthur |
Si vous voulez, oui... |
Guenièvre |
Bon. Ben... je m'approche, alors, euh... |
Arthur |
Bah c'est-à-dire si je bouge pas et puis vous non plus... |
Guenièvre |
Oui oui bon ben, je m'approche... (Se tourne contre Arthur.) |
Arthur |
(Écarquille les yeux.) |
Guenièvre |
Y a... quelque chose qui va pas ? |
(Noir.) |
Arthur |
C'est l'essence de rose... Ça me... ça me pique les yeux, un peu. |
(Stab final.) |